bob d artois a écrit :Comme vous voyez, quelqu'un me met la pression
bon je n'ai pas tout relu, j'ai pu louper qq trucs je corrigerai en live.
Bonne lecture et bonne nuit
Bob
un truc en lisant :
" mais sans en savoir assez "
on dirait une allitération, figure de style du genre : " Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ?"
c'est comme du Racine !
Dernière modification par claudius88 le ven. 04 nov. 2011 12:40, modifié 2 fois.
«C'est une erreur de croire nécessairement faux ce qu'on ne comprend pas.» Gandhi
"La Voie ne consiste pas à accomplir des actions admirables, la Voie consiste à accomplir
de façon admirable les actions ordinaires. Et ceci est la Vie dans la vie." Arnaud Desjardins
Vieille Bd mais ils avaient déjà une idée précise de ce que serait la langue française aujourd'hui
La BD vous sera utile pour trouver une des cistes mais vous n'êtes pas obligé de l'acheter, elle existe en dessin animé sur Dailymotion. Je ne vous donne pas le lien car vous êtes censés trouver le titre à partir de chronoscaphe.
La BD est aussi en vente dans la boutique du château, son accès est gratuit. Elle y est en version anglaise, il faudra que je regarde comment il représentent les grafitis
je préciserai cela dans le texte ciste.net
Bob
ps : J'ai ajouté un plan de souterrain dans le dernier chapitre
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?
Incroyable tout ce que l'on peut apprendre dans ce roman ! Je ne connaissais pas du tout cette histoire !
Quelle est cette bande dessinée ? Pouvez-vous nous mettre un lien internet s'il en existe un Grand Maître !
La marquise demanda sa voiture et se mit au lit. JE SUIS CHARLIE
bob d artois a écrit :je suis en voyage à Rennes mais je vais essayer d'expédier le Chap 20 aujourd'hui.
la bonne nouvelle est que ce ne sera pas le chapitre final, je suis en train d'étoffer la fin qui sera donc le 21.
Bob
Genoffa s’était arrêté devant la poterne de la tour nord, intriguée elle avait observé attentivement la pierre qui la composait.
- Cette porte est récente, certainement du XVIII éme, ce qui explique qu’elle n’apparaisse pas sur les plans. Mon idée est la bonne, ce donjon a été inspiré par un événement de l’antiquité, l’un de ses propriétaire a certainement voulu l’indiquer discrètement.
Elle songea : peut-être est-ce lui qui, pour la même raison, a coupé les mains de la statue de Saint-Germain en Laye ? Mais pourquoi les services secrets Français qui ont pensé à ces mains coupées, n’ont pas fait le rapprochement entre la forme du donjon et le site officiel d’Uxello…
Genoffa saisit son I-phone et fit une rapide recherche. Comme pour Alise Sainte Reine, la désignation du Puy d’Issolud comme site officiel ne faisait pas l’unanimité. Ses trois principaux concurrents étaient
Capdenac, Luzech et Cantayrac. La jeune femme utilisa la fonction cartographique de son appareil pour situer les trois hypothèses. Elle eut immédiatement la réponse à sa question :
- Les salauds ! C’était Cantayrac.
De surface équivalente au puy d’Issolud, l’oppidum était situé au cœur du camp militaire de Caylus…
- Donc celui qui a construit ce château et ses descendants, ne sont pas du même coté que ceux qui veulent faire oublier cette histoire. J’ai donc de fortes chances de trouver dans ces murs la preuve que je cherche.
Renforcé dans sa conviction, la jeune femme longea le mur extérieur du donjon, à la recherche de quelque chose de particulier à hauteur de la source. Le plan n’indiquait rien à cet endroit, elle s’attendait donc à quelque chose de discret, comme un message gravé sur la pierre qui l’orienterait vers un lieu de cache. Aussi fut-elle surprise de trouver une porte voûtée.
Les documents du donjon ne parlaient absolument pas de cet accès. Il ne pouvait donner sur la cour intérieur puisqu’ils se trouvaient beaucoup plus bas que le sol de celle-ci. Il ne pouvait non plus conduire au souterrain, qui était trop loin.
- Ce doit être une cave indépendante, se dit Genoffa
Elle essaya de l’ouvrir mais le cadenas semblait très solide.
- Bon, il n’y a pas trente-six solutions.
D’un pas alerte elle rejoignit sa voiture afin d’aller acheter un coupe-boulon. Près d’une heure plus tard elle se présenta à nouveau devant la porte. Mais le cadenas avait disparu. Elle poussa doucement le battant qui émit un grincement de protestation.
- Il y a quelqu’un ?
Genoffa s’apprêta à allumer sa lampe mais hésita, se souvenant des conseils de Julien : « Une lampe ne découvre que celui qui vous a déjà repérée ». Elle s’éloigna de l’entrée, alluma la lampe et la jeta dans la pièce puis écouta.
Ne percevant aucun bruit, elle entra la peur au ventre. La porte donnait sur le côté droit d’une cave. La torche posée à terre ne rendait qu’une faible luminosité, rien n’était visible, mais elle ressentait une présence. Elle tenta.
- Qui êtes-vous ?
Elle n’avait pas espéré de réponse, elle attendait simplement dos au mur de droite, que ses yeux s’habituent à la pénombre. Elle commença a distinguer le début de la pièce mais un peu plus loin, une archère laissait passer un fin trait de lumière, suffisamment éblouissant pour masquer le fond de la cave.
Un nuage passa, atténuant un bref instant le fil lumineux. Genoffa sursauta d’avoir identifié une silhouette. La silhouette d’un homme assis sur une pierre dans la position de quelqu’un qui attend un interlocuteur. Genoffa avait peur mais ressentait autre chose, une impression oppressante qui normalement aurait dû lui paraître désagréable et qui pourtant…
- Julien ?
Elle eut un mouvement de recul quand l’ombre lui répondit.
- Tu avais raison Genoffa...
- Tu as trouvé quelque chose ?
- Un rouleau de papyrus.
- Magnifique ! Je récupère ma lampe, on va essayer de le traduire…
- Inutile !
Le ton autoritaire de la voix figea la jeune fille dans son élan. Julien poursuivit d’une voix plus douce :
- Il est accompagné de sa traduction, je vais te la lire.
- Julien, sortons je n’aime pas cet endr…
- Aux légats Caïus Trébonius, Caïus Antistius Réginus, Caïus Caninius Rébilus, Caïus Fabius, Brutus et Marc Antoine !
L’ombre s’était levée et avait prononcé ces mots comme une sentence qui avait glacé le sang de Genoffa. Elle se colla le dos au mur, à distance suffisante de la porte et de la torche pour rester dans l’ombre. Julien reprit le texte de mémoire :
- César ordonne que les conditions de la reddition du chef barbare soient réécrites dans le sens des intérêts de Rome. Il attend que vous lui soumettiez pour la prochaine ide le récit de la plus grande bataille que Rome ait jamais livré. L’affrontement engagera l’effectif de dix légions et deux fois le double d’ennemis. La description des lieux et combats devra avoir la précision qui caractérise les commentaires de César, mais ne devra mentionner aucun lieu identifiable et aucun nom de Légion.
Genoffa avait profité de la lecture pour se déplacer dans une zone sombre faisant face à la porte. Elle cherchait un moyen de détourner l’attention de Julien afin de courir dehors. Elle ne comprenait pas son attitude et ne savait pas s’il était armé.
- Le texte n’est pas signé mais l’identité de son auteur est évidente.
La jeune femme poussa un cri, la phrase avait été murmurée à son oreille, elle s’appuya dos au mur dans un réflexe de sauvegarde.
Elle sentit son souffle et sa chaleur s’approcher d’elle et elle ne put dire un mot avant qu’il l’embrasse. Elle s’abandonna suffisamment dans l’étreinte pour constater qu’il n’était pas armé. Elle le repoussa alors vivement et bondit vers l’extérieur. La peur avait cédé la place à la rage.
Faisant face, elle le vit sortir, arborant un léger sourire qui déclencha l’ire de la jeune femme.
- Qu’est-ce que ça veut dire ? A quoi joues-tu ?
- A te faire comprendre que ceci n’est justement pas un jeu.
Il s’était approché doucement, les yeux noirs prirent leur éclat particulier et une gifle partit. D’un geste vif et précis Julien bloqua la petite main avant l’impact.
- Fini, les gifles. Je te l’ai dit, on ne joue plus.
Elle dégagea sa main et recula.
- Donne-moi le papyrus.
- Non.
- Comment savais-tu qu’il était ici ? Tu savais tout depuis le début ? Tu as fait semblant de participer à mes recherches pour mieux me surveiller ?
- Non, tu m’as réellement fait découvrir beaucoup d’éléments. Par précautions, un agent n’est informé que de ce qui lui est utile pour sa mission. Mes services m’ont caché beaucoup d’éléments, pourtant, ils sont loin d’en savoir autant que toi.
Genoffa fut tentée de le croire, mais elle se reprit.
- Que veux-tu dire par « on ne joue plus » ? Que tu me mentais encore ? Qu’y a-t-il de vrai dans notre relation ? Je ne sais même pas si je connais ton vrai nom. Je ne sais même pas qui tu… Je ne sais pas qui vous êtes.
- Non crois-moi Genoffa, je tiens à toi, je…
- Alors pourquoi ce jeu dans la cave, pourquoi chercher à me faire peur ?
- Je voulais te convaincre d'être plus prudente
- C’est une menace ?
- Mais non, comprends que des gens très puissants, ainsi que d’autres capable de tout, ont intérêt à te faire taire.
- Oui, je sais, les États-Unis, la Grande Bretagne, la France… Vous ! Vous dites que vous voulez nous protéger mais je suis seule contre vous tous ! C’est le pot de terre contre le pot de fer.
- « Le loup et l’agneau. »
- Quel loup ?
- « La raison du plus fort est toujours la meilleure » est illustrée dans la fable « Le loup et l’agneau », la morale de « Le pot de fer et le pot de terre » est : « ne nous associons qu’avec nos semblables ».
Cette phrase rappela à Genoffa un dicton analogue entendu dans son enfance : « chi col fuoco fa star l'acqua per forza fa che o questa svapora o quel si smorza. » On pouvait le traduire par : « Vouloir réunir le feu et l’eau c’est souhaiter la mort d’un des deux.»
- Excellente morale ! Elle rappelle que nous n’avons rien à faire ensembles. Vous prétendez me protéger alors que c’est vous qui me menacez le plus, mais l’agneau a des ressources. Connaissez-vous le cri gaulois ?
- Quel rapport avec notre affaire ?
- Ouvrez-votre livre au chapitre 3 du livre VII. Et ne me prenez pas pour une idiote, je sais que vous en avez un sur vous.
Julien fit un léger sourire et sortit de sa poche un livre de poche surchargé de marque-pages. Il trouva assez rapidement le paragraphe dont il était question,il parlait de l'attaque de Cebonum près d'Orléans :
« ...La nouvelle parvient vite à toutes les cités de la Gaule. En effet, quand il arrive quelque chose d'important, quand un grand événement se produit, les Gaulois en clament la nouvelle d'un champ à l'autre et de domaine en domaine; de proche en proche, on la recueille et on la transmet. Ainsi firent-ils alors; et ce qui s'était passé à Cénabum au lever du jour fut connu avant la fin de la première veille chez les Arvernes, à une distance d'environ cent soixante milles. »
- Je n’avais pas remarqué ce passage, en fait les Gaulois avaient inventé le buzz deux mille ans avant le développement d’Internet !
- Si demain à 13 heures je ne suis pas de retour chez moi, mon ordinateur enverra tous les détails de cette affaire à plusieurs blogs d’amateurs d’histoire. Certains les diffuseront, des lecteurs les reproduiront, personne ne pourra empêcher leur diffusion et, surtout personne ne pourra plus les effacer car, vous le savez, une information qui circule sur la toile le fait éternellement.
- Et votre message partira à 13h sans action de votre part ? Vous avez des talents cachés en informatique ?
- J’utilise le système Tomcat.
- TOMCAT ? Comme l’avion américain ?
- Mon ordinateur n’arrive pas à capter le Wifi quand la porte de la cuisine est fermée. Mon chat est un aventurier mais a des horaires fixes. A 13 heures il poussera la porte pour atteindre sa gamelle, mon ordinateur n’attend que ça pour se connecter et vider sa boîte d’envoi.
- Et votre chat s’appelle Tomcat...
- Non, Tom.
Julien sortit son téléphone portable et tapota sur le clavier.
- Que faites-vous ?
- Je préviens mes services de ne pas ouvrir la porte quand ils fouilleront votre appartement.
- Comment ! Arrêtez ça, je vous l’interdit !
Julien rangea son téléphone avec un sourire poli.
- Je vous faisais marcher, l’objectif de notre gouvernement n’est pas de vous museler.
- Quel est-il, alors ?
- La France a réussi à conserver ce secret pendant des siècles mais nous savons que cette attitude ne tiendra pas longtemps dans la société de l’information qui est la nôtre.
- Alors vous aller déclarer la vérité ?
- Non, mon gouvernement souhaite garder le secret mais surtout veut éviter que quelqu’un utilise cette information dans un but malveillant. Une diffusion par les historiens serait un moindre mal.
- Car n’étant plus secrète elle serait moins dangereuse… Je vois.
- Oui et surtout parce que votre communauté a une grande habileté à compliquer et remettre en cause les faits les plus évidents.
Genoffa se retint de réagir.
- Alors pourquoi la France n’informe-t-elle pas elle-même la communauté scientifique ?
- Parce qu’on nous accuserait de manipulation et puis, comme je vous l’ai dit, nous préférons garder le secret, mais pas à tout prix.
- Donc vous me laissez la liberté de me taire ou de parler ?
- Pas la liberté, la responsabilité.
- Hé bien vous avez tort ! Je vais couper mon « TOMCAT » puisqu’il n’est plus utile, mais je diffuserai mon information dès que j’aurai pu la présenter avec la rigueur nécessaire à sa publication.
- Vous savez, la vérité n’est pas toujours belle, elle peut faire beaucoup de mal.
- Je trouve ce raisonnement facile, rien ne justifie de mentir.
- Les personnes à qui l’on livre le plus de secrets sont pourtant celles à qui l’on ment le plus, celles que l’on aime.
- Je ne mentirai jamais à quelqu’un que j’aime.
- Même pour lui cacher que vous l’aimez ?
Genoffa comprit tout de suite l’allusion à une pensée si intime qu’elle-même la découvrait. Se sentant soudainement vulnérable et transparente, elle eut un réflexe de défense :
- Je crois que vous prenez vos désirs pour des réalités, notre collaboration n’avait pour moi qu’un but professionnel. Vous pourrez bientôt en lire le compte rendu, et ce sera le dernier contact que vous aurez avec moi. Adieu monsieur l’espion.
Genoffa fit volte-face et quitta les lieux sans se retourner, mais bientôt, une larme perla à son œil.
Dernière modification par bob d artois le sam. 05 nov. 2011 21:54, modifié 2 fois.
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?
Quel revirement ! Et notre belle histoire d'amour que va-t-elle devenir ? J'attends le prochain chapitre avec impatience. Merci Grand Maître pour le MP, je vais pouvoir lire aussi la BD.
La marquise demanda sa voiture et se mit au lit. JE SUIS CHARLIE
Un seul chapître pour tout remettre en forme et en état ...
J'en doute de mon côté : trop de coïncidences, tous les faits se raccrochent mais...
Dans tous les cas, un énorme bravo pour toutes les recherches préalables à l'écriture de ce roman (cette accumulation de faits vérifiables ou non me laisse réveuse) : je reste curieuse aussi de la démarche qui vous a amené à nous concocter cette superbe, sublime énigme
Murielle
En effet Dame Mumu, ce n'est pas simple de vous éclaircir cela sans être long ou ennuyeux. J'ai finit d'écrire le chapitre 21 je n'y dis pas tout pour rester clair (enfin presque ) et pour ne pas répéter ce qui a déjà été expliqué mais il devrait répondre à quelques questions que vous pourriez vous poser.
Reste maintenant à peaufiner la forme, j'ai vais donc vous laisser quelque temps sur votre tristesse
J'ai sorti les derniers chapitres un peu vite pour les faire profiter de la complète attention de ma correctrice (Dame Tioo ) je vous demande d'être indulgents sur les coquilles de diverses natures qui y sont restées
dernière chose importante pour ceux qui auraient lut le chapitre 20 dès sa sortie : Le rouleau de César était accompagné d'une traduction en français et non en allemand. Dans mon histoire, les allemands n'ont pas connaissance de sa présence.
Bob
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?
Julien n’avait pas trouvé les mots pour retenir Genoffa. Son cerveau savait qu’il avait fait ce qu’il devait mais n’avait pu se concentrer à temps sur ce qu’il voulait.
De retour à Saint-Germain-en-Laye, il déambula quelque temps le long de la terrasse qu’ils avaient tant arpentée, puis échoua en ville dans un pub fréquenté par des expatriés britanniques.
A sa seconde bière son regard fut attiré par une jeune femme accompagnant un enfant. Elle emprunta une étroite ruelle située de l’autre côté de la rue. Julien bondit et la rattrapa lorsqu’elle déboucha sur le cour Larcher.
- Alice !
- Julien ?
Le sourire spontané de la jeune mère devint plus ironique.
- Tu ne promènes pas ton italienne aujourd’hui ?
- Non, et je ne crois pas qu’elle acceptera de me revoir.
- Ça n’a pas d’importance, tu t’es emparé de la seule preuve, le secret est protégé.
- Et Genoffa ? Qui la protégera ?
- Ce n’est pas une femme pour toi Julien, tu mérites bien mieux. Oublie-la.
- Alice, il faut que tu m’aides…
- Moi ? Mais comment ?
- Raconte-moi tout ce que tu sais sur cette histoire.
- Mais Julien je ne peux pas, tu ne dois savoir…
- « Que ce qui m’est utile… » Je connais votre chanson mais cette fois elle a coûté des vies ! Sans vos cachoteries j’aurais pu éviter des drames.
- Mais…
- J’ai failli y passer moi-même Alice !
- …D’accord, allons nous assoir près des jeux d’enfants.
Le réflexe d’Alice était professionnel, peu de bruits urbains dépassaient celui d’un jardin d’enfants. Elle entama son récit sans craindre d’être écoutée.
- Le 19 novembre 1792 un jeune serrurier nommé Gamain révéla qu’il avait construit une armoire secrète pour Louis XVI.
- La fameuse armoire de fer ?
- Exactement, en fait un simple trou protégé d’une plaque de fer et dissimulée derrière un lambris. Parmi les documents qu’elle contenait figurait un rapport d’un officier de Philippe Auguste expliquant l’imposture d’Alésia.
- En apportait-il la preuve ?
- Non mais il faisait référence à un « collier Gaulois ». Tu vois de quoi il peut s’agir ?
- Un collier Gaulois ? Non. Qu’est devenu ce dossier ?
- La révélation intervenait après la « journée du 10 août » et l’arrestation de Louis XVI. Le ministre de l’intérieur ne communiqua à la convention que les pièces qui pouvaient servir au procès du Roi.
- Oui, les lettres de Mirabeau par exemple.… Et le reste ?
- Le reste fut archivé. Le dossier de Philippe Auguste ne fut exhumé que bien plus tard, par Bonaparte, après sa campagne Égypte.
- Tiens donc ?
- Tu sais qu’il s’était fait accompagner d’une centaine de savants chargé d’étudier le pays. Ils y trouvèrent un document capital : l’ordre donné par César à six de ses Légats d’inventer la bataille d’Alésia !
- Vous possédez encore ces documents ?
- Celui de Philippe Auguste oui, mais le rouleau de César a disparu à la restauration
- Et le dossier du roi ?
- Il fut oublié jusqu’à ce que Napoléon III s’intéresse à Alésia.
- Pourtant il n’en a jamais fait mention ?
- Le document était déjà explosif pour les monarchies européennes. Il aurait pu lui être utile mais faire ressurgir le passé aurait contredit son rêve de créer une Europe des nationalités. Alors qu’il était l’initiateur du développement de l’archéologie, il a eut peur que celle-ci découvre la vérité et…
- Et décida d’officialiser le site d’Alise Sainte-Reine pour clore les débats. Tout s’explique.
- Plus tard, les archéologues prirent plus de liberté. Le risque pour la paix fragile qui s’installait en Europe nous obligea à englober les sites dans des camps militaires. Les pièces les plus compromettantes furent confiées au musée de Saint-Germain-en-Laye qui créa un point de stockage dans le bunker de l’OTAN.
- Si je comprends bien, les hypothèses du type Berthier vous ont plutôt aidés puisqu’elles confirmaient l’existence d’Alésia ? …Peut-être que certaine d’entre elles ont été initiées par vous ?
- …Il est tard, je dois faire manger le petit.
- Je comprends. Je ne l’avais jamais vu, il est très mignon…
- Il n’est pas de toi, si ça peut te rassurer.
Sur ce elle l’embrassa et se leva pour chercher son fils. Julien repris la direction de son pub mais sursauta en entendant crier :
- Julien !
Une petite voix répondit :
- J’arrive maman !
Julien décida de ne pas se retourner. Arrivé dans le bar, il s’installa au comptoir et commanda une pinte, il avait besoin d’ordonner ses idées. Cette histoire s’articulait comme un tableau à deux entrées ; d’un coté deux documents, l’un Gaulois, l’autre Romain ; et de l’autre deux périodes Françaises : Celle des Rois et celle des républicains.
Pour compléter ce qu’il venait d’entendre, il lui fallait reconstituer l’histoire selon l’angle de vue des monarques, il décida d’y réfléchir :
Par un cheminement inconnu, le collier Gaulois est parvenu aux souverains de France, en tout cas à Philippe Auguste. On peut alors imaginer qu’il était déjà enterré sous l’oppidum et que celui-ci était étroitement surveillé, car la frontière était toute proche.
On comprend mieux pourquoi en 1190, avant de partir en croisade, Philippe Auguste a renforcé le château le plus proche en construisant un donjon rappelant le site présumé d’Uxellodunum. Il créa une cache pour y transférer les amphores en cas d’avance Anglaise, cache indiquée par la forme même du donjon mais qui n’accueillit jamais le collier.
Julien entama une autre bière ;
- Quelle ironie qu’un concours de circonstance ait amené Rommel à le dissimuler dans le même château !
Il avait parfois tendance à réfléchir tout haut, surtout quand il avait but. C’était un défaut gênant pour un espion…Il plongea à nouveau dans ses pensées.
François 1er dont, on sait qu’il a séjourné dans ce château, a du décider de laisser définitivement le collier dans sa cache d’origine et l’a indiqué par la forme qu’il donna au château de Saint-Germain-en-Laye.
Il finit son verre et essuya la mousse restée sur sa lèvre.
Revenons à la cache du donjon. Les plans ne parlent pas de sa porte, et, à l’époque, le sol aurait été trop bas pour qu’elle soit accessible. On devait accéder à la cache par un autre endroit, probablement le puits.
La porte voutée a dut être construite bien plus tard lorsque quelqu’un y a caché le second document : Le rouleau de papyrus de César.
- Comment est-il arrivé là ?
Il regarda le fond de son verre.
Seuls les six Généraux de César en possédaient un exemplaire. Un tel document était dangereux et accablant pour eux, ils n’avaient intérêt à le conserver que pour faire pression sur César.
…Mais après la mort de celui-ci ?
- Marc Antoine !
Le barman ne parlait pas français mais déduit qu’il commandait une autre bière.
Julien imagina les escaliers du Sénat en cette journée des Ides de Mars -44 :
Marc Antoine accompagne César mais quelqu’un l’attire à l’écart sous un prétexte futile. Un groupe de Sénateurs entoure César, les dagues sortent : il tombe, percé de 23 coups. Quand le vingt-troisième l’achève, il prononce ses derniers mots : « toi aussi mon fils »
Trois des Légats d’Alésia étaient présent ce jour là. D’un coté Marc Antoine qui mènera la chasse aux conjurés. De l’autre coté ceux vers qui sa haine sera la plus forte : Brutus, le chef et porteur du dernier coup mais surtout celui qui l’empêcha de protéger César :
- Caïus Trébonius !
Le barman apporta un bocal d’olives épicées.
On sait que Marc Antoine n’eut finalement pas besoin du document pour se débarrasser des deux hommes. Pourtant les éléments donnés par Alice conduisent à penser qu’il ne l’a pas détruit et l’a caché à Alexandrie quand, après sa défaite d’Actium, il se réfugia et mourut auprès de sa Reine égyptienne.
- Marc Antoine et moi sommes attirés par les mêmes femmes, pas étonnant qu’il ait mal fini…
Ensuite Bonaparte retrouva le document lors de la campagne d’Égypte et celui-ci disparaitra à la restauration. C’est donc Louis XVIII qui s’en est emparé et, connaissant son histoire, l’a caché dans le donjon.
- Qui possédait ce château à cette époque ?
Julien récupéra dans son sac la brochure qu’il avait achetée à la boutique du château. On y indiquait les différents propriétaires.
Le château a presque toujours appartenu à la même famille : La Roche devenu La Rochefoucauld. Pendant la révolution il appartenait au Duc Louis-Alexandre de La Rochefoucauld. Julien murmura un dialogue resté célèbre :
- « C’est une révolte ? Non, Sire, c’est une révolution »
Le Duc propriétaire du château était le cousin de l’homme qui avait annoncé la prise de la bastille à Louis XVI. Julien pensa à Genoffa et son cri Gaulois, le parallèle était frappant : la nouvelle de la révolte de Cebonum prit douze heures pour parvenir à Vercingétorix, dix-huit siècles plus tard il en faudra quinze pour que la prise de la bastille soit connue à Versailles…
Deux grands yeux noirs emplirent à nouveau son esprit, il termina sa bière et repris son raisonnement.
Le Duc lui-même fit partie des nobles qui se joignirent à la révolution ; président du département de Paris, il fut cependant destitué en 1792 puis un mandat d’arrêt fut lancé contre lui le 16 août. Arrêté, il périt lapidé lors de son transfert.
- 1792 ? Selon la déposition de Gamain, c’est le 22 mai de cette année que fut construite l’armoire de fer.
Ceci change beaucoup de choses, les propriétaires du château devaient être plus impliqués que Julien ne l’avait cru. Les rois leur avaient certainement délégué la garde du dossier de Philippe Auguste jusqu’à ce que le Duc, se sentant perdu, l’ait rendu à Louis XVI. Ce dernier, craignant pour lui-même, aurait alors fait construire une armoire indécelable pour y cacher les documents qu’il ne pouvait ni laisser aux révolutionnaires ni transférer aux monarchies étrangères qui le soutenaient.
- L’attrait de Louis pour la serrurerie était-il seulement un hobby ? se demanda Julien
S’il avait acquit suffisamment de compétence pour se passer de Gamain, il aurait pu éviter que la découverte de l’armoire de fer le conduise à la guillotine…
Ceci lui rappela une phrase de Genoffa : « vous avez tué votre Roi ».
Il commanda une autre bière et oublia la lettre de Philippe Auguste pour revenir au rouleau de César.
Le Duc mort, qui possédait le château à l’abdication de Napoléon ?
Le livre indiquait : Louis François Auguste de Rohan-Chabot.
- Mais ? C’était le chambellan de l’empereur !
Alors Louis XVIII était hors de cause. Le rouleau a été conservé par Napoléon lorsqu’il tenta de se réfugier en Amérique, intercepté par les Anglais il l’a emporté avec lui en exil en attendant de pouvoir le confier à son chambellan pour qu’il le mette en lieu sûr. Ceci implique que Napoléon connaissait l’existence de la cache, un de ses enquêteurs avait dû tout comprendre…
- Dominique Vivant Denon !
La bière suivante arriva à point nommé.
Le Baron Denon était un des principaux scientifiques de l’expédition d’Égypte, or, c’est lui qui persuada le récent empereur d’élever, à proximité des tuileries, une colonne sur le modèle de celle de Trajan. Ainsi, Bonaparte avait tous les éléments des anciens rois, de quoi faire pression sur les monarchies d’Europe.
Mais, lorsqu’il se fit nommer empereur dans l’espoir de les séduire, le secret d’Alésia ne servait plus ses intérêts. Il décida que sa dynastie prendrait le relais de sa conservation et, à l’image de Philippe Auguste et François 1er, construisit son monument : la colonne Vendôme.
Pendant que Napoléon était conduit en exil, son Chambellan pris possession du donjon et de son château et aménagea la cache pour recueillir un document plus fragile que le collier. La porte voutée fut donc construite par lui après 1816.
- Mais Napoléon était étroitement surveillé à Longwood, comment a-t-il put sortir le document de Sainte-Hélène ?
Le chambellan est mort en 1833, le château est alors retourné à la famille La Rochefoucauld.
Julien utilisa son téléphone pour vérifier la date de la mort de Napoléon : Le site consulté indiquait que l’empereur était mort douze ans auparavant, en 1821, il expliquait également que sa dépouille ne fut rapatrié qu’en 1840. A sa grande surprise, la flottille qui la transportait fit étape au fameux château !
Intrigué, Julien chercha qui signa le procès-verbal de remise du corps de l'empereur à la France, le téléphone indiqua : Philippe de Rohan-Chabot !
- La famille du chambellan !
L’esprit de Julien s’égara dans son lointain passé, lorsque jeune second maître, il fit escale en Polynésie. Une jolie Tahitienne, à qui il parlait d’amour, lui avait cité un proverbe :
« Tahiti est une île, tu n’y trouveras rien que tu n’aies apporté avec toi. »
Ainsi le proverbe fonctionnait dans les deux sens : ce que l’empereur avait apporté, il ne pouvait le ramener qu’avec lui… L’agitation entourant l’événement permit facilement à ses proches de cacher le document à l’insu des propriétaires.
- J’ai dû desceller une pierre pour le trouver, il se pourrait que les locataires actuels n’aient jamais eu connaissance de la présence du rouleau…
Julien refusa la bière suivante.
Ainsi le collier est resté dans sa cavité, au pied de l’oppidum jusqu’à ce que Rommel le déplace dans son château QG. Il ne rejoignit jamais la cache qui avait été prévue pour lui dans le même château mais Napoléon utilisa celle-ci pour y cacher le rouleau qu’il avait trouvé en Égypte : Le rouleau de Marc Antoine…
Julien n’avait pas encore donné le papyrus aux services français, il le déroula délicatement et se rappela la dernière fois qu’il l’avait lut.
- J’aurais peut-être dû m’y prendre différemment avec elle…
Mais il savait qu’il n’avait pas eu le choix. Lui aussi était attaché à la vérité, mais elle aurait dû comprendre que parfois le mensonge peut être bénéfique…
L’alcool n’avait jamais aidé Julien à oublier, il ne faisait que le rendre malade sans gêner le fonctionnement de son cerveau. Son estomac lui commanda de rentrer chez lui…
Son mal de tête le réveilla au cœur du lendemain après-midi, il consultât la messagerie de son portable le temps de se souvenir que Genoffa ne connaissait pas son numéro. Il prit une aspirine et se recoucha.
Le facteur sonna avant son second mal de tête. Julien, méfiant, déballa doucement le colis qui venait de lui être livré.
Il contenait le moulage d’un personnage en chocolat :
Un mot l’accompagnait, il n’était pas signé mais était décoré d’un papillon séché :
« Si un jour j’avais un enfant de toi, j’aimerais qu’il y croie. »
Julien sorti son téléphone sécurisé et sélectionna un des contacts mémorisés :
- Ah c'est vous Dorval ? Eh bien ce n'est pas dommage.
- Vous pouvez retirer votre dispositif, elle ne parlera pas.
- Quel dispositif ?
- Vous avez reçu ma lettre de démission ?
- Comment pouvez-vous nous assurer qu'elle ne changera pas d'avis ?
- Je me charge de la surveiller.
- Pendant combien de temps ?
- Jusqu'à ce que la mort nous sépare...
FIN
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?
Et l'amour qui finit par triompher !!! Quel romantique notre Maître Bob !
Il ne reste plus qu'à relire tous les chapitres à la loupe pour préparer la venue des cistes qui vont avec et que j'attends avec impatience !
Merci 4000 fois pour ce superbe récit !
Merci Grand Maître et Dame Tioo, vous nous avez fait profiter d'un grand moment de lecture, c'était superbe !
J'ai adoré la coïncidence de la marque du Père Noël
J'attends avec impatience votre prochaine aventure romanesque cistique.
La marquise demanda sa voiture et se mit au lit. JE SUIS CHARLIE
Abbi-Parys demanda à l’homme qui l’avait prise en auto-stop de la déposer à l’auberge du lapin savant. Elle y entra avec son sac à dos et récupéra sa clef sur le panneau.
Lorsqu’elle ressortit de l’établissement, elle était méconnaissable. Vêtue d’un tailleur strict anthracite avec de fines rayures grises, elle avait domestiqué ses mèches blondes dans un chignon soigné. Les rangers avaient laissé place à de jolis escarpins à talons fins parfaitement incompatibles avec le sentier rocailleux qu’elle aurait à emprunter.
Elle n’eut pas à attendre longtemps avant qu’une berline aux vitres aveugles vienne s’arrêter devant elle. Elle arborait les plaques typiques des corps diplomatiques et un fanion de même couleur sur l’aile avant droite. Le chauffeur la déposa deux kilomètres plus loin devant un antiquaire. Elle emprunta le chemin pavé qui grimpait à l’opposé de la boutique avec la légèreté d’une star arpentant les escaliers de Cannes. Elle le quitta dès qu’un sentier lui permit de prendre à gauche.
Proche du sommet, une sente perpendiculaire, la conduisit sur la droite, vers une sorte d’observatoire naturel. Deux hommes était présents, l’un surveillait les alentour depuis ce qu’on aurait pu appeler une fenêtre, l’autre lui demanda son passeport. Il compara la photo et lut :
« Svetlana Salhamidzic, née le 12 juillet 1986 à Trebinje Bosna i Hecegovina. »
- Vous pouvez traverser mais il vous faut mettre ceci d’abord.
- Gardez-le, j’ai mon propre voile.
L'homme lui indiqua un trou dans la roche sur la droite de la sente. Il s'agissait plus d'un boyau que d'un passage, il était impossible de le passer sans plier les jambes et courber le dos.
Parys songea : « Les fourches Caudines », cela ne m'étonne pas de lui. Que n'inventerait-t-il pas pour obliger les autres à plier l'échine.
Svetlana maitrisa la réaction de surprise qu’elle eut en sortant de l’étroit passage. Elle écarta les pans de son carré Hermès pour mieux contempler la riche tente de bédouin qui jurait avec le paysage. Elle réajusta sa tenue, se prépara à rester impassible devant le luxe qui allait bientôt l’environner et souleva la tenture.
- Une tente traditionnelle, votre Altesse ! Si vous comptiez m’impressionner sachez que je trouve cela d’un haut ridicule.
- Asseyez-vous mademoiselle et retirez ce tissus criard, vous n’en avez pas besoin à l’intérieur.
- Je n’ai pas l’intention de rester, d’autant que je n’imagine pas que vous me paierez vous-mêmes.
- En effet mais sachez que chez nous aucun accord n’est respecté s’il ne fait pas suite à de longues discussions.
- Oui. Mais ici nous ne sommes ni chez vous ni chez moi, ni dans un endroit qui m’est plaisant, je serai donc directe. Vous vouliez que le secret soit caché, voici ce qu’il en est : les Américains savaient peu de choses et ont été éliminés par nos ennemis. Quand à ces derniers ils sont morts dans un accident après que j’aie saboté leur véhicule…
- Nous avons accepté votre coté, comment dites-vous ? « Direct ? » Alors épargnez-nous les détails sordides que nous souhaitons ignorer. Nous vous avons mandatée pour détruire des preuves, pas des vies. Les Américains relanceront l’enquête mais nous saurons nous arranger avec eux. Qu’en est-il des Français ? Ils sont si imprévisibles.
Svetlana songea : « Je crois qu’en ce cas précis vous vous trompez sur les Américains. »
- Les services Français savent et savent depuis longtemps c’est une garantie suffisante de leur volonté de garder ce secret. Quand aux preuves, n’ayez crainte, je les ai détruites.
- Comment ?
- Par la terre, le feu et l’eau.
- Épargnez-moi ces images païennes. J’ai bien entendu fait vérifier ce que vous affirmez, je sais également que l'état de cette péniche ne permettra aucun renflouement. Les hommes qui vous ont accueilli vous donnerons votre dû. Vous ne m’avez pas salué en entrant, ceci m’ôte tout devoir concernant votre sortie.
Svetlana remit son voile, se dirigea vers la sortie de la tente mais s’arrêta près d’un tableau représentant une jeune femme.
- Combien avez-vous d’épouses Prince ?
- Vous le savez très bien.
- Ne croyez vous pas que c’est surtout ceci qui est générateur de querelles dynastiques ?
Le rire sonore qui combla le labyrinthe de toile la poussa à se retourner brutalement.
- Ma pauvre fille, notre dynastie est très jeune, même pas deux siècles, ses origines sont parfaitement vérifiables. En outre, ma démarche et ma personne ne sont pas liées à la monarchie régnante, j’ai droit au titre de Seigneur, pas de Prince.
- Mais alors pourquoi ?
- Parce que les révélations en cours pourraient remettre en cause la datation de Zulfikar.
- Zulfikar ! L’épée à double pointe ?
Elle retira son voile d’un geste bref, pour mieux entendre la confirmation.
- Oui, épée double à plus d’un titre puisqu’il en existe officiellement deux exemplaires, c’est un de trop.
- Comment ça, deux exemplaires ?
- L’un est en Turquie et possède deux pointes distinctes, l’autre est en Malaisie, les deux tranchants de sa lame sont séparées par une nervure. Personne, à ce jour, n’a pu déterminer quelle était la vraie Zulfikar.
- C’est donc qu’elles sont de même époque, si les nouvelles découvertes leur enlèvent quelques années à toutes deux, ça ne changera rien ! Où est le problème ?
- Le problème est que nous ne savons pas si elles sont de même époque.
- Elles n’ont pas été analysées ?
- Impossible ! Nous parlons d’objets sacrés, une analyse serait un blasphème ! Mais cette considération est étrangère à une partie des peuples, en particulier celle qui communique le plus par des moyens incontrôlables.
- Internet ?
- Voyez-vous, lorsque ces…
- Internautes ?
- Lorsque ces… gens, constateront que plusieurs épées célèbres voient leur datation remise en cause, ils demanderont que l’on en profite pour trancher ce litige.
- Et pourrait s’ensuivre une tension Est-Ouest entre les croyants.
- Ça, c’est le premier effet…
- Donc il y en a un second… Je comprends, le risque serait qu’un des camps cède et fasse expertiser son exemplaire.
- C’est à craindre, car l’autre camp devrait suivre et, quel qu’en soit le résultat, on verrait une autre division se créer.
- Entre ceux qui ont couvert le blasphème et les autres.
- Entre les élites qui en avaient le pouvoir et le peuple qui l’a subit.
- C’est pour cela qu’ils n’accepteront jamais l’expertise, pour éviter une fracture entre les peuples et leurs dirigeants.
- Vous avez compris.
- Donc tout cela pourrait se tasser très rapidement.
- Non, car il y a un troisième effet.
Il se leva et souleva un pan de la tente pour observer le méandre du fleuve. Sans la regarder il lui demanda :
- Avant cette affaire, quelle était votre position sur le site réel de la bataille d’Alésia ?
Surprise par la question, elle hésita, mais ses souvenirs lui vinrent en aide.
- Aucune mais mon compagnon penchait pour Chaux-des-Crotenay.
Il se retourna brusquement.
- Et pourquoi diable ?! De nombreux scientifiques et les dirigeants successif de la France ont pourtant maintes fois confirmé qu’Alésia et Alise Sainte-Reine ne faisaient qu’un.
Elle se sentit personnellement attaquée.
- Alors pourquoi refuser systématiquement les autorisations de fouilles sur Chaux-des-Crotenay !!
Il reprit son calme et son sourire.
- Nous y voila…Pour le peuple, celui qui refuse l’expertise est toujours celui qui a tort. Il en sera de même pour les épées.
- Mais… Vous disiez que les deux camps refuseront ?
- En effet, et ce sont deux nouveaux camps qui se diviseront.
- Deux autres camps ?
- Un proverbe Arabe dit : « Entre deux vérités, le temps fait toujours son choix. Il n’échoue que face à deux mensonges.»
Elle regarda sa montre d’un air las.
- Gardez vos proverbes et légendes pour les petites filles. Vous pensez donc que les « gens » feront courir le bruit que l’on refuse d'expertiser les deux épées pour cacher qu’elles sont fausses.
- Ce serait un moindre mal, vous n’y êtes pas.
Il saisit la théière et, d’un grand geste remplit une première tasse d’un liquide chaud et aéré. Il dirigea la théière vers la seconde tasse, regarda son interlocutrice puis renonça à verser et s’assit à nouveau pour déguster la sienne. Après l’avoir posée, il reprit.
- Vous savez que nous sommes déjà divisés entre deux interprétations concernant celui qui reçu cette épée.
- Oui, disons que certains le voient comme un successeur parmi d'autres, d’autre comme l'héritier. Le don de l’épée appuie la position de ces derniers.
- C’est un bon résumé, vos « gens » pourraient donc insinuer que l’une des deux épées est la vraie mais que, comme les armes d’Alésia, son âge a été surévalué.
Les yeux de Svetlana s’écarquillèrent. Elle répondit dans un murmure, comme si elle s’adressait à elle-même.
- Une épée réelle mais trop jeune pour avoir été transmise du vivant de son donneur…
- Ainsi s’envolerait la notion d’héritier.
- Mais… Vous-même êtes sunnite, comme moi, comme votre monarque. Toute aberrante que soit cette hypothèse, elle conforte ce en quoi nous croyons. En quoi vous fait-elle peur ?
- Un président Français avait cette maxime : « On rassemble son camp au premier tour, on élargit au second. » Hors démocratie, je dirais qu'on accède au pouvoir en rassemblant son camp, on s'y maintient en élargissant. Rien n'est pire pour un dirigeant que de voir la faction qui le soutient, réclamer qu’il dénigre celle qui lui reste à conquérir.
- Toujours le maintien du pouvoir de quelques-uns…
- Vous pouvez l’entendre ainsi mais ces dirigeants ont réussi à maintenir un statu quo sur certaines frontières et à l’intérieur de beaucoup d’états. Bousculer ces équilibres d’une manière ou d’une autre pourrait faire beaucoup de victimes.
Il se déplaça à nouveau pour observer l’extérieur.
- Cette falaise rougit, la nuit va tomber bientôt. Restez une heure de plus et je me sentirai obligé de vous prendre pour épouse. Je ne vous cache pas que cette idée me soulève le cœur, la sortie est dans votre dos.
C'est une Svetlana déstabilisée qui quitta la tente. Oubliant son foulard elle s'engagea maladroitement dans le boyau, souillant son dos de craie et son genou de sang. Plus que ses conclusions, c’était une donnée du raisonnement qui l’avait perturbée :
« Celui qui refuse l’expertise est celui qui a tort »
- Serait-ce la version laïque et moderne de l’orlanie, « le jugement de Dieu » ?
La plupart des religions l’ont un jour pratiquée, les Francs, par exemple, plongeaient l’accusé dans l’eau bénite, s’il coulait on considérait qu’il était accepté par l’eau bénite donc disait le vrai. L’idée n’était pas si barbare, un homme sûr de son bon droit et ayant foi en Dieu, plongeait l’esprit confiant, sans emplir ni bloquer ses poumons et… coulait. Entre deux opposants l’épreuve était souvent évitée, en considérant que le plus prompt à la refuser était le menteur...
Parvenue au niveau de la route, elle retrouva la berline noire qui la conduisit à son auberge. Quand le chauffeur redémarra son regard resta fixé sur le fanion vert.
- Vous vous trompez d’épée Altesse. La plus menacée est celle qui figure sur votre drapeau. Cette épée sur laquelle sont gravés les noms de tous les prophètes depuis Moïse.
Supposez que Genoffa se soit trompée, que les pilums d’Alise datent de Marius. L’erreur des historiens serait inverse et les armes datées par rapport à Alésia serait plus âgées d’environs deux cent années. Parmi ces « gens » comme vous les appelez, il s’en trouverait, soyez-en sûr, pour affirmer que cette épée est plus ancienne qu’on le dit.
Deux siècles, c’est suffisant pour qu’on fasse courir un bruit immonde, pour que l’on prétende que le dernier nom gravé ne puisse l’avoir été de la même main…
Nous savons tout deux que cela est faux mais, comment le prouver sans expertise ?
Celui qui refuse est celui qui a tort…
De soucieux le visage de Svetlana devint soudain vide d’émotion, puis se fit grimaçant, enfin quelques larmes apparurent.
Elle prit son téléphone portable et sélectionna un correspondant dans sa liste de contacts, celui-ci fut prompt à répondre :
- Allo ?
- Genoffa ? C’est Abbi.
- Abbi ? Ah oui, Parys, comment vas-tu ?
- Mal, je… Je fais des cauchemars, je n’arrête pas de penser à cet accident. Il faut que j’en parle à quelqu’un.
- Où es-tu ?
- Pas loin du donjon que tu connais, on peut se retrouver là-bas, je…
- J’arrive.
Lorsqu’elle raccrocha, les larmes avaient disparu sur un visage froid qu’un sourire étrange, rendait encore plus dur.
- Je sais prince que vous n’aimez pas mes méthodes, mais, voyez-vous, le problème…
C’est que je termine toujours le travail pour lequel on me paie...
Dernière modification par bob d artois le sam. 19 nov. 2011 00:29, modifié 1 fois.
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?