Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du Bob

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bob d artois
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

Episode 6 : quand l'inspecteur obtient ce qu'il cherchait.

Bob B)
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?

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bob d artois
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

VIII- Le Calvaire de la reine

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Anne-Sophie déplia sa carte.

- Il est impossible de voir la tour de cette rive, je propose d’aller sur l’autre, à l’endroit qui se trouve en face des fenêtres.

Arrivé sur les lieux, les compagnons ne tardèrent pas à trouver ce qu’ils cherchaient : Un calvaire situé juste en face des « appartements » de Marguerite. Le peuple pouvait ici communier avec sa reine face à la même croix.
L’inspecteur sortit une paire de jumelles pour observer la fenêtre puis, intrigué, les passa à l’architecte.

- Avez-vous vu cette petite tour en contrebas des murailles ?
- En effet elle était invisible de là-haut. Je n’arrive pas à voir par où on y accède…

Tiens ? On dirait qu’il y a une fenêtre dans le mur qui est à gauche de la tour.
Elsa qui habitait près d’une réserve ornithologique était mieux équipée. Sa longue vue sur trépied lui permit de constater qu’il s’agissait d’une ouverture. Elle se releva soudain comme surprise.

- Qu’as-tu ?
- Il m’a semblé voir un homme dans l’ouverture… Un japonais.

L’inspecteur rangea ses jumelles.

- Bon, de toute façon cela ne nous aide pas dans notre enquête. Rentrons voir si les garçons s’en sont mieux tirés.

L’inspecteur réuni tout son monde dès son arrivé. Il fit un résumé de la visite du château puis il donna la parole à Thierry.
Ce dernier, plus cérémonieux que d’habitude, se leva et attendit le silence pour déclarer :

- Inspecteur, vous nous avez engagés dans cette aventure pour obtenir la réponse à une question précise.
Nous avons cette réponse.

Surprit, l’inspecteur s’installa profondément dans son fauteuil, comme pour visionner un film télévisé.

- Alors allons-y jeune homme. Expliquez-moi comment Philippe le Bel a organisé cette arrestation spectaculaire sans éveiller le soupçon du Temple.
- Il n’a rien organisé inspecteur. Le roi s’est contenté d’appliquer un plan conçu par les Templiers eux-mêmes.

Thierry avait soigné son effet. Il attendit que tous s’installent en auditeurs attentifs, puis reprit :

- Nous savons déjà que les Templiers avaient découvert que l’argent pouvait produire de l’argent. Nous avons compris qu’ils disposaient de deux types de financement : de l’argent réel provenant des dons ou bénéfices et de l’argent virtuel.
Il fallut un événement dramatique pour qu’ils comprennent que ce dernier ouvrait des possibilités intéressantes.

Il lut un parchemin trouvé dans un des coffres.

- Lors de la VIIIéme croisade, Louis IX est capturé. La rançon demandée pour sa libération est élevée et les Templiers sont mis à contribution.
Le Conseil de l'Ordre du Temple, après la mort de Guillaume de Sonnac, a désigné Etienne d'Otricourt comme Commandeur pour assurer l'intérim. C'est ce dernier qui doit remettre au sire de Joinville l'argent pour la rançon, caché dans la galère amiral de l'Ordre.
Là se situe un épisode que les ennemis des Templiers transformeront en témoignage à charge pour dénoncer l'avarice de l'Ordre.
Lorsque le sire de Joinville demande l'argent, le Commandeur lui rappelle que la Règle du Temple interdit de faire des prêts sans garantie, mais qu'en cas de force majeure, le Grand Maître peut céder devant la force.
Le sire de Joinville s'empare d'une hache, et s'apprête à briser les serrures du coffre désigné par Etienne d'Otricourt.

- Mais je ne comprends pas. Le rachat des prisonniers était l'une de ses missions du Temple. Il y a même un tableau qui l’illustre dans l’église de Gisors.

- En effet, aucun des deux personnages n'est dupe; le Temple est d'accord pour remettre l'argent, à condition que Joinville fasse mine de s'en emparer par violence.
Le Maréchal de l'Ordre, Renaud de Vichiers, ancien Précepteur de France, est présent. Plutôt que de laisser éventrer le coffre, il en tend les clefs à Joinville, prétextant que l'Ordre possède, à Saint-Jean d'Acre, un dépôt royal qui servira de garantie. L'honneur des banquiers du Temple est sauf !

- Oui, au prix d’une contorsion difficile à reproduire. Ne pouvaient-ils pas modifier cette règle imposant une garantie à leurs prêts ?
- Non, ils étaient particulièrement intransigeants sur ce point, mais cette contrainte n’avait cours que pour l’argent réel. Le second argent étant virtuel, il n’entrait pas les règles données précédemment, ils purent donc le prêter sans gage et sans intérêt.
- Mais justement quel était leur intérêt à eux ?

Anne-Sophie murmura
- Non nobis dominé…

Thierry souri.

- Comme le rappelle Anne-Sophie, les Templiers étaient désintéressés par vocation. En troquant l’épée contre la finance, ils ont changé d’arme, pas d’objectif.
Les Templiers se sont aperçu que les croisades avaient énormément bénéficié à l’Europe, non par les conquêtes obtenues mais parce que les chevaliers s’étrillaient en Terre Sainte au lieu de guerroyer au pays. Il s’en est suivit une longue période de paix qui à bénéficié à l’économie et au bien-être du peuple. Les Templiers ont donc pensé qu’ils ferraient plus de bien en développant l’économie qu’en se battant contre l’infidèle. Ils ont même géré plusieurs fois eux-mêmes le trésor royal.
La bourgeoisie naissante et les investisseurs comme les Lombards profitèrent de cet argent à taux zéro de façon classique jusqu’à ce que l’un d’eux invente ce qu’on appellerait aujourd’hui « l’effet levier ».
- Levier est un terme qui me parle dit l’architecte mais je ne vois pas le rapport avec la finance.
- L’effet levier est au cœur de la crise financière de 2008. Tout vient de la notion de rendement financier qui s’est substitué à la notion de rendement économique. Par le passé, on considérait qu’un investissement était d’autant plus rentable que l’on avait peu emprunté pour l’obtenir.
- C’est le bon sens en effet.
- Sauf si les bénéfices attendus sont supérieurs aux intérêts de la dette. On a donc inventé la formule du rendement financier dans lequel le poids de la dette n’intervient pas mais où apparaissent les intérêts du prêt.

Aux yeux ronds qui lui faisaient face Thierry compris qu’il fallait aller au but.

- Pour simplifier, dans une période de croissance élevée et de taux d’intérêts bas, plus vous vous endettez plus vous faites de bénéfices. Imaginez ce que cela pouvait représenter au moyen âge avec ses prêts sans intérêts ? C’est là qu’intervient l’effet levier :
Un noble disposant d’une somme lui permettant d’acheter une parcelle de terre pouvait désormais emprunter aux Templiers de quoi acheter les neuf parcelles adjacentes. Son achat fait, il n’avait pas besoin d’attendre la moisson, les dix parcelles réunies valaient plus que la somme des dix. Il les revendait donc avec bénéfice et remboursait les Templiers, faisant ainsi un large profit avec de l’argent qu’il n’avait pas.

- Pas mal dit Ivan, mais l’occasion d’achat de terres remembrables ne devait pas être si fréquente.
- Malheureusement oui et de petits malins décidèrent de faire de l’argent directement avec de l’argent, en le prêtant avec intérêt.
- Mais c’était interdit !
- Seulement si les deux intervenants avaient la même religion.
- Les Templiers auraient donc pu prêter avec intérêt ?
- Oui mais c’était hors de leur éthique en revanche ils empruntaient avec intérêts.
- Pourquoi emprunter avec intérêt alors qu’ils prêtaient à taux zéro?
- Ils prêtaient l’argent virtuel à taux zéro dont ils n’avaient pas besoin mais empruntaient avec intérêt de l’argent plus solide pour leur investissements à long terme. Et c’est là que ça a foiré.
- Ah, ça a donc foiré. Dit Elsa. Ca me rassurerait presque.
- La solution évidente était un jeu à trois consistant à prêter par l’intermédiaire d’un membre d’une autre religion. Si l’on inclut les « mécréants », il y avait quatre religions dominante à l’époque, ceci aurait dû donner beaucoup de possibilité de prêts rémunérateurs mais le problème était que les Etats de l’époque étaient relativement homogènes culturellement.
Le taux d’intérêt du second emprunt pouvant être plus élevé que le premier, certains se sont spécialisé dans ce rôle. Les préteurs empruntant à d’autres préteurs, l’origine de la somme devint de plus en plus obscure et les Templiers s’aperçurent qu’ils empruntaient de l’argent provenant parfois de leur propre argent virtuel.
- C’est dingue. Donc de l’argent virtuel, amplifié par l’effet de levier a irrigué toute l’économie ? Que se passa-t-il alors ?
- Rien… Jusqu’à ce que le climat s’en mêle.
- Allons bon. Nous y revoilà.
- Les aléas climatiques faisaient partie de la vie du moyen âge mais, à partir de l’année 1303, la planète subit un refroidissement global de plus d’un degré que l’on appellera plus tard le petit âge glacière.
Elsa et Ivan échangèrent un sourire.

- Les rendements baissèrent amplifiés par la peste noire qui décimait la main d’œuvre. Les terres moins rentables et sans main d’œuvre perdirent de la valeur alors qu’elles étaient les gages des prêts solides. L’argent réel devenait virtuel.
- On se trouvait donc devant une bulle financière qui allait éclater.
- Oui et c’est cette bulle et non la bulle écrite par le pape qui a conduit à la fin du Temple.
- Le roi s’en est aperçu ?
- Non, les Templiers ont réagi avant et sont allé le voir pour lui demander de dissoudre l’ordre.
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bob d artois
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Message par bob d artois »

J’espère que vous vous êtes bien reposés car ce soir ça repart dans tous les sens :D

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Message par Fabye »

:one:
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Ne crois pas que tu t’es trompé de route quand tu n’es pas allé assez loin. (Claude Aveline) :'OO':
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Message par bob d artois »

;)

Ah non, petite erreur, c'est demain que ça se corse.
Là on est encore le week-end

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Message par bob d artois »

IX- Le pari de Pascal

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L’inspecteur se redressa dans son fauteuil, tendant une oreille incrédule.

- Attendez, j’ai manqué un épisode. Qui a suggéré la dissolution de l’ordre ?
- Vous avez bien entendu. Les Templiers étaient incapable de rendre l’argent prêté, ils savaient que si le scandale était connu toute la confiance dans l’économie se s’effondrerait, et par là toute l’économie de l’Europe. En dissolvant l’Ordre pour des raisons religieuses avec l’appui du Pape, on donnait une raison acceptable à la ruine des préteurs.
- Vous voulez dire que Jacques de Molay a demandé au roi de l’arrêter ainsi que tous ses semblables ?
- Non le Grand Maître était en terre Sainte à l’époque. Les Templiers s’étaient scindés en trois groupes : Ceux qui guerroyaient, ceux qui cultivaient les terres et ceux qui cultivaient l’argent. Ce sont ces derniers qui avaient le pouvoir, ils avaient besoin d’être compétents mais pas nombreux. Petit à petit les membres du premier groupe, puis bientôt du deuxième, devenaient pour eux un boulet.
- Un boulet ?
- On devenait Templier à vie. Un guerrier peut se transformer en paysan parfois mais un paysan se transforme difficilement en clerc. De plus tous ces gens était là par vocation, comment leur dire : « Allez voir ailleurs vous nous coûtez trop cher » ?
- Ils auraient pu puisque la règle de l’Ordre Temple leur signifiait qu’il était le seul juge de ce qui leur serait demandé.
- Oui mais comment le peuple aurait-il réagi ?
- Et le roi ? A sa place j’aurais dit : « C’est votre problème, débrouillez-vous ».
- C’est en gros ce qu’il a dit. Mais en 1306 suite aux premiers effets de la crise, une révolte populaire a obligé le roi à se réfugier … Dans le Temple. Ses hôtes ont pu ainsi lui expliquer que la ruine des préteurs ferait certainement beaucoup de mal mais une perte de confiance en l’économie provoquerait un retour à l’âge de pierre. Ils ont ajouté que leur solution comprenait par elle-même leur punition.
- le roi fut convaincu ?
- Philippe le Bel est l’inventeur des États-généraux, il s’appuyait sur la bourgeoisie pour contrer le pouvoir des nobles et du clergé. Un tel scandale lui aurait aliéné son allié. La solution des Templiers était la seule possible et lui donnait l’occasion de se venger d’eux.
- Ce qu’il n’a pas manqué de faire. Mais le Pape ?
- Le Pape n’était pas au courant, il fut difficile de le convaincre puis, le balancier étant lancé, encore plus dur de l’arrêter. Philippe se trouva contraint de brûler le Grand Maître alors qu’il le savait innocent.
- Oui, innocent du crime dont on l’accusait et innocent du crime financier
- Cette histoire m’apparaît encore plus terrible que celle des livres.

D’un œil effaré, l’inspecteur relisait les notes prise pendant l’exposé. Toute extraordinaire qu’elle soit, cette solution donnait une explication à tous les événements de l’affaire.

- Il me faudrait plus de temps pour étudier cette hypothèse.

Thierry s’assit face à lui, le regarda dans les yeux et, d’une voix douce :

- Inspecteur…Vous l’avez déjà suffisamment étudiée. Vous savez que ce n‘est plus une hypothèse.

L’inspecteur soutint le regard, se redressa et ouvrit son téléphone portable.

- Inspecteur Reval…Oui, très bien, merci. Vous vous souvenez des quatre dossiers dont nous avons parlé…Oui, c’est cela. Pourriez-vous les passez au broyeur, je ferai les régularisations à mon retour…Oui, j’y penserai, je vous remercie, au revoir.

Il coupa la communication d’un air absent.

- Mesdemoiselles, messieurs, vous pouvez rentrer chez vous, mais auparavant je souhaiterais vous offrir une coupe de champagne pour vous remercier et…peut-être aussi pour m’excuser de vous avoir un peu forcé la main.

Comme à chaque fois, le gérant avait bien fait les choses mais l’ambiance n’était pas à la fête, une certaine gêne s’était installée. Profitant du silence, l’inspecteur porta un toast.

- J’hésite à vous le dire mais…Enfin, c’était agréable de vous…
Oh et puis zut ! Je veux savoir ce que les Templiers font avec leurs ordinateurs. J’ai besoin de vous pour continuer cette enquête.

Les jeunes gens se regardèrent d’un air complice, comme s’ils avaient attendu cette question. Elsa s’approcha pour remplir la coupe de Paul.

- J’espérais que vous me le proposiez inspecteur. J’ai quelques doutes sur le désintéressement et la compétence de ces Templiers modernes. Je voudrais être certaine qu’ils ne nous conduisent pas à une autre catastrophe.

Près de la cheminée, Anne-Sophie trempait consciencieusement un biscuit dans sa coupe. Elle fronça un sourcil agacé quand une partie tomba au fond du verre. Gardant ses yeux sur lui elle murmura :

- J’ai pris beaucoup de plaisir à cette aventure. J’ai cru longtemps que c’était parce que nous y côtoyons l’histoire, les vielles pierres, tout ce que j’aime mais…Je…
Je n’avais pas connu cela depuis que ma sortie de l’ENA…

Elle releva la tête, une larme coulait sur sa joue.

- Je vous adore, tous.

Elle baissa les yeux puis les releva vers Paul.

- Cela vous concerne aussi inspecteur.

Étonné et plus ému qu’il ne voulait le laisser paraître, le policier la serra par l’épaule d’un geste paternel puis s’adressa à Ivan.

- Je ne veux forcer personne mais la fin de l’enquête sera orientée sur l’informatique.

Anne-Sophie leva deux yeux humides sur le garçon. Ivan répondit avec sa sobriété habituelle.

- OK.

Depuis un certain temps, le front baissé, Thierry faisait tourner sa coupe vide comme pour en inspecter chaque reflet.

- Ce sera sans moi.

Il releva la tête.

- Elsa, je sais que cet argument ne va pas me faire remonter dans ton estime mais chaque jour passé ici me fait perdre une fortune. Il faut que je sois raisonnable.

Il posa sa coupe, enfila sa veste et pris la direction de la porte. Il marqua un temps sur le seuil pour dire, sans se retourner.

- Vous me manquerez.

Elsa regarda les autres d’un air interrogateur puis se précipita vers la porte.

- Thierry !

Mais celui-ci avait déjà préparé son départ et elle vit la voiture quitter la propriété. La jeune fille tourna un visage triste et sévère vers l’inspecteur.

- Pourquoi n’avez-vous rien fait pour le retenir ?! Vous savez que nous aurons besoin de lui.

L’inspecteur vida sa coupe dans une plante verte, se servit un verre de Calvados et s’installa dans son fauteuil.

- Thierry ne prend jamais de décisions sans avoir étudié tous les paramètres en jeu. Seul un fait nouveau pourrait lui faire reconsidérer son choix.

Alors qu’Elsa regardait la plante dépérir, il dirigea son verre vers la lumière pour en apprécier la couleur.

- Combien de coupes a-t-il bues avant de partir ?

Anne-Sophie écarquilla ses grands yeux.

- Non ! Vous n’avez pas fait ça ?!

L’inspecteur savoura une gorgée puis regarda sa montre.

- Il devrait être de retour pour dîner, mais il va falloir lui faire passer la pilule.
Vous avez d’autres jolies robes à nous faire découvrir mesdemoiselles ?

Quelques temps et lieues plus loin, sur le green du trou numéro 11, un homme vit sa balle rougir sous le soleil couchant.
Sa main plongea dans le trou pour la récupérer quand une ombre ternit la croix rouge de sa chevalière. Il reconnut la paire de baskets d'un non licencié.

- Alors ? Ils avancent ?
- Difficile de répondre en deux mots. Je ne sais toujours pas s’ils représentent une menace, ils feraient peut-être même d’excellentes recrues. Je crois aussi qu’il faut s’attendre à l’apparition d’un nouvel acteur.
- D'où sort-il ?
- De l'Est.
- Quel genre d'Est ?
- Le genre extrême.
- Rentrons par le 18, il est assez long et isolé.

Au manoir, le retour de Thierry commença par une franche explication avec l’inspecteur, mais il ne fut pas difficile de le convaincre, surtout lorsqu’il vit le menu de réveillon proposé par le gérant.

- J’imagine que c’est l’État qui offre ?
- Si vous faites partie de l’équipe oui, mais il reste une condition.
- Dites toujours.
- Les filles ont proposé de décorer la salle et d’organiser l’animation du réveillon. Cela signifie deux choses : L’heure du repas sera un peu décalée et elles ne veulent pas vous avoir dans les pattes.

Tous deux éclatèrent de rire.

- J’imagine que vous avez trouvé quelque chose pour nous occuper ?
- Nos Templiers ne vont certainement pas travailler ce soir, vous pourriez faire une petite visite au poisson d’Elsa, si Ivan est d’accord.
- Si l’alternative est d’accrocher des cotillons, je crois que je peux répondre en son nom.
- Je vous souhaite donc une bonne soirée. Je ne serai pas des vôtres, j’ai une famille.

D’un naturel peu démonstratif, Ivan sut montrer, d’un regard, la joie qu’il avait de retrouver son camarade. Thierry profita du trajet en voiture pour expliquer sa décision.

- Tu sais, les mouvements boursiers sont un peu ralentis en fin d’année, et puis nous sommes en bonne compagnie dans ce manoir. Elsa est peut-être parfois énervante mais Anne-Sophie est vraiment très jolie, et intelligente en plus. A ce propos, ça ne t’étonne pas qu’elle croie en Dieu ?
- Je ne sais pas. Ce qui m’étonne, c’est que toi tu n’y croies pas.
- Moi ? Tu me fais marcher ?

Je ne prends une position qu’en ayant calculé mes risques, et puis...Regarde comme je vis ! Tu crois que je pourrais laisser tout cela pour une utopie.

- Si c’en est une tu perdrais une vie en effet, mais sinon tu gagnerais la vie éternelle. Fais le calcul, tu es perdant statistiquement.
- Comment peux-tu faire un raisonnement aussi tordu ?
- Ce n’est pas un raisonnement, c’est un pari, celui de Pascal.

A l’intérieur de la levée de terre qui fut une enceinte, ils découvrirent assez vite le poisson gravé et entamèrent la fouille des alentours. Quelques temps plus tard Thierry appela Ivan de la main alors que sa torche pointait quelque chose au sol.

- Tu vois ces morceaux de champignons arrachés ?
- Oui, ils ne devaient pas être comestibles.
- Ils ne devraient surtout pas être ici. Ce genre de champignon ne pousse pas sous ce type d'arbres.

Il s’éloigna d’une vingtaine de mètres vers le talus.

- Regarde. C'est ce genre d'endroit qui leur est favorable.
- Tu t'intéresses aux champignons toi ?

Thierry retourna au premier endroit.

- Tout ce qui se vend à un prix déraisonnable m'intéresse. Ces champignons ont dû être déplacés avec des feuilles pour cacher quelque chose. Et je parierais que c'est une trappe.

Accompagnant ces mots il dégagea une fente rectiligne dans le sol. Il se releva et se dirigea vers le poisson en murmurant.

- Reste à savoir comment l'ouvrir...

Regarde ! Les pierres du poisson s'enfoncent.

- Attends ! Tu as appuyé sur tous ?
- Oui mais ça n'a rien donné. Je vais essayer d’autres combinaisons.
- Non ! Si c'est un code il doit permettre un nombre maximal d'essais. Essaie plutôt dans l'ordre EDF.

L'idée fut judicieuse et la trappe s'ouvrit en déversant la terre qui la couvrait. Trois mètres plus bas, les lampes des jeunes gens dévoilèrent un hall de béton. Sur un côté se trouvait un chariot hydraulique permettant d'élever des charges au niveau de la trappe.

- Regarde ! Dit Ivan. Il y a aussi un ascenseur, je vais essayer de l'appeler.
- Non ! Cherchons plutôt un escalier. Cria Thierry.

Le hurlement d'une sirène lui fit comprendre qu'il avait parlé trop tard et qu'il était temps de partir.
Une demi-heure plus tard, le gérant les accueillit à l’entrée du manoir avec un sourire malicieux.

- Bonsoir messieurs, j’ai pris la liberté de placer deux smokings dans vos chambres, c’est un prêt gracieux de la maison.
- C’est gentil mais cela ne sera pas nécessaire. Répondit Ivan surpris.
- Comme il vous plaira messieurs mais j’ai croisé vos cavalières… Vous avez beaucoup de chance.

Thierry frappa l’épaule d’Ivan en riant.

- Allez mon gars, cette fois tu n’y couperas pas.

La salle et leurs personnes étant prêtes pour la soirée, les deux filles s’étaient retrouvées autour de la cheminée. Cette attente leur permit de faire mieux connaissance et se termina logiquement en parlant des garçons.
Elles tombèrent assez vite d’accord sur le fait qu’entre une place sur un tableau de chasse et le romantisme d’une clef à molette on ne leur offrait pas un choix aisé.
Après le rire qui s’en suivit, Elsa posa la question qui la tourmentait depuis le début de l’aventure.

- Je voudrais comprendre une chose Anne-Sophie. Comment concilies-tu ta foi et ta culture scientifique ? Cela ne semble pas te poser de problèmes.
- Si, bien sûr. Cela me place face à des doutes.
- Ah.
- Mais pas plus que toi.
- Moi ? Comment cela ?
- Par exemple, si l’on s’accorde sur le fait que l’homme est responsable du réchauffement de la planète. Comment expliques-tu que ce réchauffement stagne depuis quinze ans alors que le taux de Co2 augmente ?
- Ah non ! Tu ne vas pas t’y mettre aussi. Pendant ces quinze années l’activité solaire a été particulièrement calme et plusieurs éruptions volcaniques ont projeté des particules qui ont renforcé l’écran de l’atmosphère.
- Et comment expliques-tu cela ?
- Nous avons eu de la chance, comment veux-tu expliquer autrement un tel phénomène ?
- Simplement : Dieu a vu que nos bêtises nous exposaient à avoir trop chaud alors il a baissé le radiateur et tiré les rideaux.
- Alors selon toi, nous pouvons faire toutes les « bêtises » possibles puisqu’ « Il » est là pour réparer ? Tu penses que les mesures que nous proposons ne serviront à rien ?
- Je pense que vous avez déjà fait ce qu’il fallait. Quand ton petit neveu renverse son bol, qu’attends-tu de lui ? Qu’il prenne la serpillère ?
- Surtout pas, il ferait d’autres bêtises. Je veux simplement qu’il s’excuse.
- C’est ce que le monde a fait il y a quinze ans. En publiant peut-être une courbe fausse, il a cependant reconnu ses fautes. Dieu n’en demande pas plus. Surtout si le « plus » doit conduire à oublier son commandement : « croissez et multipliez ».
- C’est beau, mais je n’arrive pas à y croire, désolée.
- Tu préfères croire à la chance ?
- On croirait entendre Thierry ! Dit Elsa en se levant brusquement. Puis elle se ravisa et tensa sa camarade :
- Et si nous réussissons à faire baisser le taux de Co2, il nous laissera geler ou il filtrera l’atmosphère ?
- Je pense qu’il a prévu ce cas et tu le sais très bien. Répondit Anne-Sophie en se levant. J’ai entendu une voiture, on se prépare à les accueillir ?

Figée dans ses pensées, Elsa se redressa comme un automate.
On pensait qu’une partie du réchauffement disparu ces quinze dernières années avait été absorbée par les océans. Comme si elle était stockée en vue d’un usage futur…

Le repas et la fête qui s’en suivit combla les quatre jeunes gens. Bien que seule Anne-Sophie l’ait admis, tous avaient craint que la fin de l’enquête brise une amitié plus profonde qu’elle ne paraissait.

Les filles avaient très bien organisé les choses et après les traditionnels vœux de minuit, elles exhibèrent un vieux grimoire traitant des danses médiévales. Ivan qui n’avait jamais dansé de sa vie se trouva alors sur un pied d’égalité avec son camarade et dévoila des capacités à évoluer avec des mouvements amplis de souplesse et de maîtrise qui enchantèrent ses cavalières.

Samedi 1er janvier 2011

C’est donc épuisées et comblées qu’elles quittèrent la soirée vers trois heures du matin.
Ivan, de son côté ronflait dans son fauteuil habituel. Thierry décida de ne pas le déranger mais, en lui cherchant une couverture, mit la main sur la bouteille préférée de l’inspecteur.
Il eut été dommage de la goûter seul.

Le lendemain vers dix heures, lorsque les filles cherchèrent de la compagnie pour leur petit déjeuner, elles découvrirent deux visages endormis sur une table près d’une bouteille de Calvados vide.
Les documents qui les entouraient indiquaient qu’ils s’étaient déjà engagés dans la seconde étape de l’enquête.
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Message par bob d artois »

Après les larmes et le champagne :sorcerer: , ça repart B)
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X- Liber Abaci

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L’inspecteur retrouva l’équipe pour le déjeuner, il se renseigna sur l’expédition de la veille puis Thierry proposa une réunion dans le colombier. Lorsque tous furent installés il commença son exposé en projetant l’image d’une marguerite, ce qui fit rire Anne-Sophie.

- C’est gentil de nous accueillir avec des fleurs. Qu’en penses-tu Elsa ?
- Je vois de quoi ils ont parlé toute la nuit. Ils ont certainement imaginé les frasques cochonnes de la Reine dans la tour de Nesle.

Thierry se tourna vers elle pour déclarer tendrement :

- Je t’aime, passionnément, à la folie...

Elsa agrippa la cuisse de sa voisine.
- Tu crois qu’il a fini de décuver ?

- Je voulais juste t’expliquer que si un jour tu penses ne pas m’aimer du tout c’est que tu auras effeuillé une marguerite transgénique. En effet, ce type de fleur possède 34, 55 ou 89 pétales ce qui n’offre que trois possibilités. Je laisse maintenant la parole à Ivan.
- Ca m’étonnerait, il dort.
- Ah... Ok. Les nombres 34, 55 et 89 font partie d’une suite célèbre que l’on trouve souvent dans la nature : la suite de Fibonacci. Ce que l’on sait moins c’est que Fibonacci était contemporain des Templiers et publia un livre qui traitait notamment des calculs financiers et des prêts à intérêts :
Le Liber Abacci.
Avec Ivan, nous pensons que les Templiers ont découvert les possibilités de la finance grâce à ce livre. Partant de ce postulat et des documents à notre disposition nous avons reconstitué l’histoire que je vais vous raconter.

- Tu ne pourrais pas éteindre le projecteur avant ? Demanda Ivan qui s’était réveillé.

Thierry s’exécuta d’autant plus volontiers qu’il commençait aussi à avoir mal au crâne et c’est sous la simple lueur verte d’une lampe de bibliothèque qu’il précipita ses camarades au treizième siècle.

- Nous sommes vers l’an 1200 ; les Templiers découvrent les calculs financiers et beaucoup d’autres choses, telles que les chiffres arabes et le zéro grâce au livre de Fibonacci. Ils recrutent des clercs pour faire des simulations. Ce travail prend des années mais ils finissent par comprendre et décrire les mouvements financiers à posteriori.
- A postériori ?
- Oui je veux dire qu’en analysant les mouvements financiers sur une période passée, ils parviennent à comprendre comment ils ont évolué et pourquoi. Cette étape franchie, ils décident d’essayer de créer des modèles d’évolutions financières. Ils parviennent à les tester : des paramètres antérieurs permettent d’expliquer ce qui arrive dans le présent. Bien entendu cela exige des mois de calculs à une armée de clercs. Cela leur demande donc plusieurs siècles avant d’obtenir quelque chose de fiable.
Contents de leurs résultats, les Templiers cherchent alors à tester si le modèle peut prévenir une crise économique. Pour cela ils décident d’en créer une de toute pièce.
- Créer une crise économique pour tester un modèle ? Mais c’est inconscient ! S’insurgea Anne-Sophie en préparant une aspirine pour Ivan.
- L’outil informatique n’existant pas ils n’avaient pas d’autre choix.
- Pas d’autre choix que de ruiner de pauvres gens ?
- Ils s’arrangèrent pour ne ruiner que des riches rassures-toi. Leur idée géniale fut de créer une bulle financière sur un produit qui venait d’apparaitre, n’avait pas d’incidence sur d’autres secteurs, n’assurait aucun besoin vital et n’intéressait que des personnes moralement douteuses.
- Des incroyants je parie. Grogna Elsa.
- Mais non, des personnes souhaitant étaler leur richesse ou s’enrichir en spéculant.
- J’aime mieux ça, mais quel était ce produit ?
- La tulipe.
- Allons bon nous revoilà dans les fleurs.
- Oui sourit Anne-Sophie, mais plus dans Fibonacci puisque la tulipe a six pétales.
- Non, répondit Thierry, elle a six tépales dont trois sépales et trois pétales.
- Tu t’intéresses aux fleurs toi ?
- Tout ce qui se vend à un prix déraisonnable l’intéresse. Dit Ivan en vidant son verre.

Thierry lui fit un clin d’œil avant de poursuivre.

- Découverte en Asie, la Tulipe a été importée en Europe, puis en Hollande au début du XVIIème siècle. La Tulipe a séduit par ses couleurs et la multitude de variétés qu’il était possible de créer mais en Europe, la récolte ne pouvait se faire que pendant la période chaude. Les Templiers suggérèrent donc aux marchands de se porter acquéreur des fleurs à l’avance selon un prix déterminé, moyennant une livraison en été. Les marchands et agriculteurs des Pays-Bas pratiquaient donc les opérations à terme. Différence notable avec les marchés de futures contemporains, c’était un marché de gré à gré et non pas ce qu’on nomme de nos jours un système multilatérale de négociation. Il n’y avait pas de chambre de compensation…
- Halte ! Dit l’inspecteur. Je n’arrive pas à me concentrer. Vous n’avez pas vu ma bouteille ?
- Sous le sapin, indiqua Ivan.

La cave du manoir était suffisamment bien fournie pour qu’ils puissent lui improviser ce cadeau réparateur. Le prix avait cependant approché le déraisonnable.
Thierry essaya de simplifier son discours.

- le prix du bulbe de tulipe se mit à flamber sur le marché. Les achats et ventes à terme s’emballèrent et des spéculateurs, étrangers au commerce et à la production de bulbes et de fleurs firent leur apparition, achetant des bulbes sans aucune intention de se faire livrer. La bulle éclata en février 1637 ruinant de nombreux investisseurs.
- Les Templiers avaient prévu une telle catastrophe ?
- Non et je pense que cela répond à une de vos question inspecteur. Les indices que nous avons trouvés dans la tour du prisonnier sont trop récents pour être attribués à l’entourage de la Reine Marguerite. Je ne serais pas surpris que notre fameux prisonnier soit l’homme qui a initié la crise de la tulipe.
- L’hypothèse me plait, ils ne pouvaient tuer un collaborateur mais il valait mieux le laisser à l’abri de toute pression. Cette mise au secret ne pouvait comprendre l’accès à la confession, ce qui expliquerait que certains indices aient été intégrés dans l’église locale. Est-ce cohérent au niveau des dates ?
- Nous resterions dans la fourchette qu’Elsa avait établie inspecteur, mais revenons à notre histoire. Bien qu’obtenant un effet beaucoup plus désastreux que prévu, le modèle apporta les réponses attendues et permit aux Templiers de comprendre comment fonctionnait une crise et comment l’empêcher.
- Tu veux dire qu’ils auraient été capables d’empêcher les crises suivantes ? Pourquoi ne l’ont-ils pas fait ?

L’aspirine ayant fait son effet, c’est Ivan qui répondit à Anne-Sophie.
- Parce que les calculs nécessaires dépassaient déjà les capacités humaines, ils durent attendre que les premiers calculateurs soient construits. Je pense que cela explique l’histoire de Gisors et de Lhomoy.

Les participants regardèrent l’informaticien avec stupeur. Sachant que la suite ne serait pas simple à faire comprendre il testa la nouvelle bouteille de l’inspecteur.

- Après l’épisode de la tulipomania, les Templiers suivirent l’évolution de la technique et influencèrent indirectement l’engagement de l’Etat français dans ces recherches. Toute leur action fut une course poursuite toujours perdante entre l’évolution technologique et la complexification des mécanismes financiers. Ils sont peut-être en passe d’enfin la gagner.
- Quel rapport avec Lhomoy ?
- Je pense que lorsque les premières machines suffisamment puissantes et fiables ont été conçues, les Templiers ont prévu la création d’un centre de calcul secret sous le château de Gisors. Pour cela ils devaient s’assurer qu’aucune fouille n’y serait jamais conduite. Je te laisse conter ton hypothèse Thierry.
- Merci Ivan. En fait, je pense que Lhomoy n’a jamais trouvé la chapelle Sainte Catherine, on lui a montrée.
- Séduisante hypothèse qui expliquerait pourquoi il ne l’a jamais retrouvée, reste à nous dire qui et comment ? Demanda l’inspecteur.
- Pour le « qui », il s’agit des Templiers, pour le « comment » je suis obligé d’imaginer. Je pense qu’ils ont contacté le jardinier pour lui demander de protéger un secret situé sous le château.
- Quelle justification à cette confiance ?
- Ils n’avaient pas le choix, Lhomoy s’intéressait de près à tout ce qui touchait au château. Ils lui dirent qu’ils préféraient l’avoir de leur côté puisqu’il découvrirait la chapelle tôt ou tard. Voici comment je vois cet épisode : Ils lui donnent rendez-vous dans le Donjon, lui bandent les yeux et le font descendre dans les caves et ressortir par la petite porte marquée d’un oiseau, de là ils le conduisent à l’entrée du souterrain menant jusqu’à la chapelle puis lui laissent découvrir l’endroit. Ils lui rebandent les yeux et, de retour dans le Donjon, lui demandent de ne rien révéler.
- Ce ne fut pas une réussite.
- Détrompez-vous tout se déroula selon leurs plans. Lhomoy cherchant le souterrain sous le Donjon ne pouvait pas le trouver.
- La distance ne l’a pas surpris ?
- Non, il était logique pour lui qu’on le fasse tourner en rond. A bout de ressource il choisit de se faire aider par les pouvoirs publics mais, pour garder le titre d’inventeur, il fit croire qu’il avait déjà découvert le site. Il savait qu’aucune autorité ne risquerait un employé dans ses tunnels croulants, l’Etat devrait donc créer une nouvelle fouille puis, après la découverte, en donner le mérite à Lhomoy. C’est ce qui se passa sauf que l’Etat ne pouvant trouver la chapelle sous le donjon en conclut à son inexistence.
- Ah oui, dit Anne-Sophie, cet enchaînement d’événements ne pouvait conduire qu’à une chose : l’interdiction définitive des fouilles sous le château. Peut-être ont-ils également influencé les experts chargé d’analyser les failles du Donjon car la solution pour y remédier était idéale pour eux. Avec les quinze piliers qui ont été coulés, ils peuvent construire ce qu’ils veulent en dessous, rien ne s’écroulera.

Elsa réfléchit.

- Un truc ne colle pas dans cette histoire, l’ordinateur n’a été inventé qu’en 1946, bien après les fouilles de Lhomoy, de plus ce n’était qu’un engin expérimental.

Ivan repris la main.

- C’est pour cela que je parle de calculateur. Le terme ordinateur est trop restrictif en ne s’appliquant qu’aux techniques digitales. Pourtant le mot lui-même était connu et utilisé par les Templiers bien avant leur dissolution.

Les yeux étonnés de l’assemblée se tournèrent vers Elsa.

- Il a raison, il s’agissait d’un terme religieux signifiant « Dieu met de l’ordre ».
- Le terme n’était plus utilisé lorsqu’IBM lui donna une autre signification. Reprit Ivan. Pour continuer sur le plan historique, rappelez-vous dans quel domaine la recherche technologique absorbait le plus les finances des grands états des années trente.
- Les cuirassés bien sûr, répondit l’historienne. C’est ce qui conduit à la première conférence mondiale sur le désarmement. Quel rapport avec l’informatique ?
- A l’époque où Lhomoy commença ses fouilles, ces monstres d’acier de 300 mètres filaient 30 nœuds et pouvaient tirer à 30 km c’est-à-dire au-delà de la ligne d’horizon. Il pouvait y avoir plus de cent mètres de distance entre leurs canons de poupe et de proue, comment croyez-vous qu’ils pouvaient faire but sur des navires se déplaçant à la même vitesse qu’eux et rarement en ligne droite ? Sans compter l’effet du vent relatif sur des obus de près d’une tonne. Même la rotation de la terre avait une influence via la force de Coriolis.
- Tu veux dirent qu’ils utilisaient des ordinateurs de tir ?
- Des « calculateurs » de tir, qui utilisaient une technologie analogique très performante mais leur déniant le nom d’ordinateur. Cette technologie est en passe de revenir à la mode, justement pour le calcul du climat.

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- Ok, ponctua l’inspecteur. Il semble très probable que les Templiers aient influencé la recherche sur les calculateurs de tir avant d’influencer celle des simulateurs d’explosion nucléaire, mais qu’ont-ils fait entre temps ?
- Je n’en sais rien mais j’ai une idée, peut-être ont-ils joué un rôle dans la conception de l’AGC.
- L’AGC ?
- « Apollo Guidance Computer », il s’agit de deux calculateurs identiques installés sur le module de service et le module lunaire d’Apollo, un de leurs rôles était de faire amerrir le module lunaire.
- Tu veux dire « alunir » rectifia Anne-Sophie.
- Si tu veux, mais puisque l’on parle d’amerrir quand la capsule spatiale tombe dans le pacifique, j’utilise le même terme quand le LEM se pose sur la mer de la sérénité. Pour en revenir à notre sujet, l’intervention des Templiers pourrait expliquer certains faits troublants concernant Apollo 11.

Le visage d’Elsa s’éclaira.

- Ah ! Toi aussi tu penses que les Américains ne se sont jamais posés sur la Lune.
- Heu…Non. Mais je ne suis pas certain qu’ils aient eu besoin d’un ordinateur embarqué pour cela. Ils se sont d’ailleurs posé en manuel
- Pourquoi ?
- Juste avant l’am… L’alunissage, l’ordinateur a signalé plusieurs fois un code d’alarme que personne ne sut identifier immédiatement. On apprit plus tard que l’ordinateur n’avait pas de problème particulier à ce moment-là mais après avoir plusieurs fois ignoré cette alarme, l’équipage décida de se poser en manuel ce qui eut pour effet de décaler la zone d’alunissage de six kilomètres.
- Tu veux dire que cet ordinateur n’a servi à rien ?
- Je cite simplement une controverse. Tout le monde s’accorde sur le fait que la conception de ce calculateur a accéléré fortement le développement des circuits intégrés et des ordinateurs. Il y a moins d’unanimité sur le fait qu’il ait été capable de piloter Apollo 11. En tant qu’informaticien, je trouve certains arguments de ces complotistes pertinents, par exemple le fait que l’on ait créé un calculateur multitâche sans prévoir des piles pour gérer le retour des interruptions.
- Il marchait à pile ? Demanda Paul.
- Non inspecteur, « pile » est un terme informatique qui désigne une mémoire…
Anne-Sophie le coupa.

- Peut-être est-il inutile de nous noyer dans la technique. Tu penses donc que les Templiers ont influencé l’utilisation d’un calculateur sur Apollo dans l’unique but de développer la recherche. L’objectif d’être utile à la mission n’ayant peut-être pas été atteint puisque secondaire. Mais Apollo était un projet purement américain, or nous avons vu que ; pour les cuirassés, le nucléaire ou le climat ; l’influence des Templiers s’est toujours exercée sur la recherche française.
- Effectivement, comme ce fut le cas pour leur première vocation. C’est justement ce qui m’a mis la puce à l’oreille. Comment expliquez-vous que tous les calculs de l’ordinateur d’Apollo aient été faits en système métrique alors que toute la mission s’appuyait sur les unités américaines. Les contraintes de poids et d’encombrement nécessitaient d’utiliser le programme le plus simple possible et d’éviter tout calcul inutile. Pourtant ils ont ajouté tout un processus pour traduire les données métriques en unités compréhensibles par l’équipage. J’ai remarqué alors plusieurs originalités dans la conception de l’AGC, en particulier le système « LOL ».
- Lol ? Comme le « mort de rire » de nos sms ?
- LOL comme “Little Old Lady”. Elsa, peux-tu nous citer l’erreur la plus souvent commise concernant l’équipement des Templiers ?
- Je ne vois pas le rapport mais je dirais l’armure de plates. Les Templiers les mieux équipés se contentaient de cotes de mailles mais l’essentiel d’entre eux portaient son ancêtre composé d’anneaux de fer cousus entre eux.
- Probablement cousus avec soin par de petites vielles. Tout ordinateur possède deux types de mémoire, une pour stocker le programme, une autre pour traiter les données. La première est plus facile à réaliser car on n’y écrit qu’une fois d’où son nom « Read Only Memory ». Concernant Apollo la lecture devait être rapide mais l’écriture pouvait être lente puisque faite avant le départ. La solution fut un système d’anneaux magnétiques dans lequel on faisait passer ou non un fil électrique, indiquant ainsi des 1 ou des 0. On appelle cela de la mémoire tissée. Ce « tissage » étant souvent réalisé par des dames d’un certain âge, son surnom sur Apollo était LOL pour « la petite vielle ».

Ivan projeta une photo, Elsa la contempla perplexe.

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- Le parallèle est amusant, mais j’espère que tu as quelque chose de plus convaincant.
- Comme je l’ai dit, je n’ai que des suppositions. Une autre particularité du système est qu’il utilisait deux méthodes de traitement des données. L’une classique plutôt adaptés aux additions/soustractions des calculateurs comptables, l’autre utilisant un système à virgule flottante adapté aux multiplications/divisions des calculs scientifiques.
- Un peu comme la différence entre les chiffres romains et les chiffres arabes introduits par le livre de Fibonacci.
- C’est là que je voulais t’amener. Les chiffres arabes, qui étaient plus probablement indiens, permettaient une écriture décimale positionnelle qui conduira à la virgule flottante. Fibonacci publia son livre en 1202…
- Oui c’était au cœur des croisades, tu nous en as déjà parlé.
- En effet. Je vous ai dit également que, juste avant de l’alunissage, l’AGC généra plusieurs fois un code d’erreur qui surprit tous les intervenants.
Ce code d’erreur était « 1202 »

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Un petit rire se fit entendre dans l’assistance médusée. Tous se tournèrent vers Anne-Sophie qui se leva pour dessiner quelque-chose au tableau.

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- Il est mignon ton petit module lunaire Anne-Sophie mais en quoi ai-je dit quelque chose d’amusant ?
- « Knight to queen's bishop three… »
- Pardon ? C’est quoi cette histoire de reine et de chevalier ? Demanda l’inspecteur.
- C’est le coup qui permet à l’ordinateur de vaincre un humain aux échecs dans le film « 2001 l’odyssée de l’espace ». Son côté génial est de sacrifier la reine pour glisser un cavalier à sa place. C’est ce cavalier qui gagne la partie.
- Je vois que vous essayez d’établir un rapport entre les supercalculateurs spatiaux et le fait qu’on ait sacrifié la reine Marguerite pour permettre la mission des chevaliers du Temple. Vous connaissant j’imagine que vous avez autre chose pour appuyer cette thèse ?
- L’ordinateur en question est nommé HAL or, si vous décalez chacune de ses lettres d’un rang, vous obtenez le nom de l’entreprise qui a conçu l’ordinateur du Datacenter d’EDF.
L’inspecteur consultât rapidement ses notes.
- Ah oui, effectivement.
- C’est pour cela que sur les forums du film on voit souvent écrit que le nom du constructeur est égal à HAL + 1. Mais cela devient plus captivant si on écrit ce nom en minuscules : Hal + 1 peut vite devenir Hall.
- Si on veut, et alors ?
- Eldon C. Hall est le concepteur de l’Apollo Guidance Computer.
- Pas mal. Et vous pensez qu’il y a un message dans le film de Kubric ?
- Oui et de taille. Kubric fait une erreur lorsqu’il décrit le coup. HAL aurait dû dire « knight to queen's bishop six » au lieu de « knight to queen's bishop three ».
En échec « queen's bishop six » permet au joueur noir de désigner la case f3. La même case désignée par le joueur blanc donnerait « queen's bishop three ».
- Il désigne donc le coup gagnant comme s’il avait été conçu par son adversaire ?
- Oui, à l’instar d’un Philippe le Bel arrêtant les Templiers selon un plan conçu par eux-mêmes.
- …Et pourquoi avoir dessiné ce module lunaire ?
- Je n’ai pas dessiné un module lunaire, j’ai juste traduit les lettres « AGC » en code Templier.

L’inspecteur esquissa un sourire ironique.

- Je trouve notre architecte beaucoup plus convaincante et pédagogue que vous mon cher Ivan. A supposer que vous ayez raison, cet épisode n’a-t-il pas démontré la limite de la méthode Templière ? Pourquoi cet attachement à la France et à l’Europe alors que, dans les années qui suivent, l’industrie électronique va leur échapper au profit des Etats-Unis puis de l’Asie.

Ivan leva les yeux au ciel.

- Bien entendu, si l’on parle de fabriquer à la chaîne des ordinateurs de salon qui vont servir de machine à écrire ou de console de jeu, nous ne leur arrivons pas à la cheville.
En revanche si on parle de vraie électronique, qui ne plante pas tous les deux jours et reste réparable plusieurs années, la France reste bien placée. En particulier dans les domaines aéronautiques et spatiaux.
Lors du centenaire du salon du Bourget le prix du meilleur fournisseur a été attribué à une entreprise française : la Société d’Electronique du Haut Anjou.
- En effet ça fleure bon le terroir. Pensez-vous qu’elle est infiltrée par les Templiers ?

Ivan sourit.
- Voici son logo :

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- Nom de D… S’exclama l’inspecteur
- Non, pas le sien mais l’un de ceux que nous avons rencontré dans la Bible, mais j’ai mieux. Venez voir.

Tous se levèrent pour se retrouver autour du billard sur lequel était étalée une carte du sud de la Mayenne. Une ville attira l’œil d’Elsa.

- Mais c’est le fief d’origine d’un des grands Maîtres de l’Ordre !
- En effet Elsa mais c’est une des bourgades voisines qui m’a mené à cet endroit. La société d’électronique du haut Anjou est implantée ici.

Tous s’approchèrent pour identifier les bâtiments. L’inspecteur eut un soupir admiratif.

- C’est troublant… Pensez-vous que nous devrions aller enquêter là-bas pour chercher une confirmation ?
- Peut-être pas, car j’ai trouvé quelque-chose de plus intéressant. La ville est encadrée de deux croix : une rouge et une blanche.
- Comme Gisors ??!
- Exactement. J’ai donc pensé à tracer un triangle reliant ces croix et l’usine.

Ivan changea de carte.

- Si on reporte un triangle de même proportion sur les croix blanche et rouges de Gisors, le troisième angle se retrouve au-dessus de cette grotte.

L’inspecteur leva les yeux vers Ivan.

- Vous êtes encore là ?


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A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?

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XI- Les sables d’Hattin


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Dimanche 2 janvier

L’inspecteur compris assez rapidement que son équipe avait besoin d’une bonne nuit de sommeil. Les deux garçons partirent le lendemain à la recherche de la grotte.

Celle-ci se présenta sous la forme de deux accès perçant le flanc d’une falaise calcaire. Les deux jeunes gens décidèrent de se séparer mais s’aperçurent vite que les deux entrées conduisaient à un même labyrinthe. N’ayant pas abandonné l’espoir de trouver le contenu des trois coffres de Neaufles, Thierry fit une recherche plus approfondie. A sa grande surprise c’est en regardant vers la voute qu’il trouva un indice. Des niches y étaient creusées, pareilles à celle qui avaient abrité les chauves-souris de la chapelle souterraine.

- Cacherait-on des documents dans cet endroit ? S’interrogea le trader.

Il chercha le pied de parois le moins aisé d’accès et fouilla. Sous une épaisse couche de cailloux, une pierre plate lui dévoila un coffret de bois que le temps semblait avoir épargné. L’écrin recelait deux parchemins. Le premier écrit en latin ne lui fut d’aucune aide mais l’autre ressemblait à un plan.
- On dirait les méandres d’un fleuve marécageux…

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La voix d’Ivan résonna à l’autre extrémité de la grotte.
- Il n’y a rien ici. Tu as trouvé quelque-chose ?
- Non.

Thierry recacha le coffret et conserva les deux documents dans sa veste. Lorsqu’il retrouva Ivan, il l’éloigna de la caverne pour le conduire vers la maison toute proche.

- Regarde, d’ici nous avons une vue parfaite sur la tour de Neaufles qui a abrité le trésor des Templiers et la relique de Saint-Louis. Je pense qu’ils la surveillaient à distance en utilisant cette grotte comme abri.
- Si c’est le cas elle n’a aucun intérêt pour nous, rentrons.

De retour au manoir, Thierry attendit d’être seul avec Elsa pour lui présenter le texte latin, se gardant bien de lui dévoiler l’existence du plan.

- J’avais oublié de te montrer ce document qui était dans une des liasses du dernier coffre de la chapelle.

Elsa l’examina.

- C’est un peu dur à traduire, le latin est ancien. Pourtant le support est récent, je dirais même contemporain. Elle trouva une table pour griffonner la traduction, Thierry recopia le résultat.


Lentement mon âme s'élevait au-dessus des sables qui couvriraient bientôt le lieu du martyr Templier. Cernés par les flammes ils furent tous exécutés.
Au-delà des dunes, vers l’orient, une flèche semblait surgir du sol pour indiquer le trésor que portaient les chariots.
Mais ce n’était qu’un mirage qui détournait mon regard des cornes protectrices.
Là où fut enfouie la vraie croix.


- « La vraie croix » ? Ce doit être la croix templière de Gisors, elle indiquerait donc bien un trésor !
- Tu n’y es pas du tout, on appelle « vraie croix » celle sur laquelle le Christ fut crucifié.
- Elle existe encore ?
- La dernière trace d’elle date de la bataille d’Hattin en 1187. Les croisés furent encerclés par Saladin sur un couple de collines en plein désert. Saladin fit enflammer les broussailles pour amener les dernier défenseurs à la reddition.
Les Templiers qui faisaient partie de la troupe furent tous décapités par le vainqueur.
- Et la « vraie croix » ?
- Elle accompagnait toujours les croisés à la bataille mais Saladin ne s’en empara pas. On dit que des Templiers l’enterrèrent sur place.
- Connait-on la localisation de cette bataille ?
- Oui, elle a eu lieu près du lac de Tibériade. Les collines étaient nommées : « les cornes d’Hattin ».
- Voici qui explique une grande partie du texte, mais il parle aussi d’un trésor.
- D’un « mirage de trésor », Thierry. Une parabole pour signifier qu’en s’emparant des bagages ennemis, Saladin est passé à côté du plus important.
- La croix ?
- Oui, mais si tu penses aller sur place fouiller le sable, je te préviens que d’autres s’y sont déjà cassé les reins.
- Pourtant elle devait bien faire trois mètres sur deux !
- Je ne pense pas qu’il s’agisse de la croix complète, probablement une petite croix taillée dans le bois de la vraie.
- Super trésor…

Sur ces mots ils rejoignirent l’équipe dans la bibliothèque. Ivan avait déjà expliqué à l’inspecteur l’hypothèse d’un site Templier permettant de surveiller à distance les secrets de la tour de Neaufles. Le policier fit le point.

- Le lien entre cette grotte et la société mayennaise confirme les explications d’Ivan. Les Templiers ont certainement créé un centre de calcul secret et tout nous conduit à le situer sous le donjon de Gisors. Nous savons que le seul ancien souterrain qui y conduise a été bouché après l’installation de la ligne électrique. L’accès à la salle doit donc se faire par le souterrain neuf. Le problème est que l’accès ouest abouti à une sortie, pas à une entrée.
- L’entrée est peut-être à la verticale de cet endroit. Proposa Anne-Sophie.
- C’est une idée mais le tunnel est long et peu rectiligne, il est difficile de situer en surface l’endroit où nous avons été bloqués.
- J’ai mon idée pour cela. Depuis que j’ai vu la croix templière je me suis demandé pourquoi elle était nommée « croix percée » alors qu’il s’agit plutôt d’une croix cerclée.
- En effet, si elle n’était pas percée ce ne serait pas une croix. Poursuivez.
- J’ai repris le raisonnement qui m’avait conduit à lier la croix blanche à la croix rouge. J’ai cherché un autre monument religieux qui aurait été percé.
- Et vous en avez trouvé un…
- Non, j’ai trouvé un monument religieux « troué ».
Elle indiqua le lieu sur la carte.

- Comme pour les croix, j’ai tracé un trait entre le vestige percé et le vestige troué et j’ai remarqué qu’il passait par ce bâtiment qui est d’époque templière.

Elle posa une règle sur la carte puis indiqua un bâtiment.

- Je ne comprends pas votre tracé.
- Rappelez-vous que la croix templière a été déplacée, c’est son emplacement d’origine qu’il faut considérer.
- Je comprends, mais votre règle passe par beaucoup d’autres bâtiments.
- J’ai découvert également que des fouilles dans ce bâtiment avaient révélé ceci :

Elle montra la photo d’un squelette.

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- Je comprends, vous voulez faire le rapprochement avec le cadavre sculpté de l’église.
- Exactement. Rappelez-vous le nom complet de l’homme qui était codé dans la date du cadavre, retirez-lui les lettres du nom du data center, il vous restera cinq lettres.
- En effet.
- Dans un ordre différent, ces lettres forment le nom de ce qui était la destination du bâtiment indiqué par le trait.


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Dernière modification par bob d artois le mer. 24 févr. 2016 22:41, modifié 1 fois.
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Ce soir fin de la Partie 2 B)

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XII- Tous nos Compléments

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La serrure ne résista pas longtemps à l’inspecteur et tous pénétrèrent dans le bâtiment pour échapper aux curieux. Ils furent déçus de ne trouver qu’une pièce désespérément vide.

- Heureusement que quelqu’un a décoré les murs, constata Anne-Sophie.
- Oui, et ça me rappelle une des méthodes préférées de nos Templiers. Cette décoration est l’œuvre d’un artiste reconnu, elle empêche ainsi tous nouveaux travaux. L’autre chose qui m’intrigue est l’état du sol, ces feuilles ne correspondent pas aux arbres proches.
Ivan donna un coup de coude à Thierry.
- Tu n’avais pas vu ça ?
- Pourquoi m’intéresserais-je à des feuilles mortes ? Vous pensez qu’il y aurait une trappe comme à Val-de-Reuil inspecteur ? Il manque le poisson pour ouvrir.
- Pourquoi n’as-tu pas allumé la lumière en entrant ? Demanda Anne-Sophie en continuant d’admirer la voute.
- Parce qu’il n’y en a pas, quelle question.
- C’est juste. Alors à quoi peut bien servir le coffret électrique aussi hideux qu’imposant qui est derrière vous ?

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Ivan réussit à ouvrir le boitier avec sa clef de voiture dévoilant deux panneaux équipés chacun de huit disjoncteurs. Au-dessus se trouvait un interrupteur général qu’il enclencha.

- Reste à connaître l’utilité des 16 autres.

Thierry essaya de tous les enclencher, sans résultat

- Dis-moi Ivan, les mots binaires d’Apollo étaient sur combien de bits ?
- Quatorze, auxquels il faut ajouter le bit de retenue et le bit de parité.

Elsa intervint.

- C’est quoi cette histoire de bits ?
- En calcul décimal on parle de nombres composés de chiffres. En calcul binaire on parle de mots composés de bits. Tout le reste est identique, à la différence qu’en binaire il n’y a que deux états 1 ou 0, comme pour ces disjoncteurs. Puisque nous voulons descendre d’un étage, je vais coder les disjoncteurs pour obtenir le nombre « un » en binaire.
- Attends ! Dit Ivan. Si tu modifie un bit, il faut que tu modifie celui qui indique la parité. C’est le premier à gauche. Le suivant est la retenue, nous n’en aurons pas besoin puisqu’il n’y a pas de calcul.

Malheureusement ces consignes ne conduisirent à aucun succès.

- Pardon Ivan. Quand je fais installer un ascenseur, le sous-sol est indiqué «-1 » et pas « 1 ».
- Exact Anne-Sophie ; dit Ivan en tapotant sur sa calculatrice. Voici ce qu’il faut indiquer pour « -1 ». Thierry, pense aussi à la parité.

Devant un nouvel échec Thierry commença à perdre son calme, mais une idée lui revint.

- Ivan, n’avais-tu pas dit que les concepteurs de l’AGC avaient utilisé un codage des nombres négatif bien peu performant ?
- Mais oui ! Ils ont utilisé le complément à un alors que le complément à deux existait déjà. Il faut juste modifier ainsi.
- …Tu as oublié le bit de parité.

A l’instant où Thierry fit la correction le sol se mit à trembler et, dans un bruit hydraulique qui arracha un cri à Anne-Sophie, l’ensemble du sol descendit lentement. Le bruit cessa lorsque la plate-forme se stabilisa. La roche nue apparaissait sur deux côtés, un autre se rétrécissait en un long couloir et le dernier donnait sur une large porte.

- Si ceci est la porte qui nous a bloqués il y a quelques jours, ce couloir doit mener au château de Gisors.

Sous l’éclairage sélectif de quelques torches le groupe s’engagea dans la galerie opposée à la porte. Le tunnel, de facture plus moderne que les précédents, permettait un déplacement aisé mais ennuyeux.
Après une marche qui leur paru interminable, ils aboutirent à une porte semblable à celle que l’on trouvait sur les anciens navires de guerre, elle ne possédait pas de serrure mais était verrouillée par un sorte de volant.
Thierry fit jouer le mécanisme. On entendit les verrous grincer puis le gémissement d’un air sous pression qu’on libère. Immédiatement après l’ouverture le groupe fut happé par une chaleur lourde. Le couloir continuait jusqu’à une porte plus simple.

Lorsque Thierry l’ouvrit tous furent aveuglés par une intense lumière.

Anne-Sophie leva les yeux pour échapper à l’éblouissement.
Lorsqu’elle réussit à nouveau à accommoder elle constatât qu’ils se trouvaient sous une large voute en partie taillée artificiellement. De la partie périphérique de la voute émergeaient à intervalles régulier des piliers de béton descendant jusqu’au sol. Tous étaient identifiés par une sorte de numéro de classement.
Ses yeux s’étant habitués à la lumière, elle orienta à nouveau son regard vers le centre de la grotte.

Ce qui les avait éblouis apparaissait maintenant sous la forme parallélépipédique d’un bâtiment moderne dont les larges vitres renvoyaient l’éclairage intérieur.
A son sommet deux conduits d’aération s’élevaient jusqu’à pénétrer la voute. Leur présence ne pouvait signifier qu’une chose.

- Inspecteur, voici votre Datacenter.
Dit Anne-Sophie.

Dernière modification par bob d artois le mer. 24 févr. 2016 22:43, modifié 1 fois.
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Message par bob d artois »

FIN de la Deuxième Partie B)


N'hésitez pas à faire des commentaires entre les chapitres, ça me fait toujours plaisir :) et ça me permet de savoir qui lit B)

Attention, grâce à BIGBROTHER j'ai corrigé une imprécision dans le chapitre d'Hattin.(XI)
Relire les 6 lignes précédent le vrai squelette.

Bob
Dernière modification par bob d artois le mar. 01 mars 2016 12:28, modifié 1 fois.
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?

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Message par BIGBROZEUR »

bob d artois a écrit :XII- Tous nos Compléments
XIII- Tous mes compliments :'OO': :'OO': :'OO': :one: :one: :one:

B) B
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Message par mamafrau »

:one: :one: :one:
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Message par bob d artois »

Merci les gars ;)

Je vais faire une petite "pose" d'un ou deux jours avant la dernière partie pour la fignoler et vous laisser le temps de vous y retrouver dans le début.

Bob
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Message par BIGBROZEUR »

Bon week, re poses toi bien ;)
B) B
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Message par mamafrau »

Un pose s'impause en effet ! :D :music: :jesors:
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Message par bob d artois »

J'aurais dû dire "faire une selha" :D
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Message par bob d artois »

C'est reparti pour la dernière ligne droite (Heu... droite ?)

DERNIERE PARTIE CE SOIR

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par définition, c'est la partie que j'ai le moins relue, j’espère que ça ne se verra pas trop B)

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Message par bob d artois »

I- La rencontre

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Ils pénétrèrent facilement dans le bâtiment et débouchèrent dans une salle au cœur de laquelle trônait une immense armoire sombre égaillée de petits voyants colorés et frénétiques.
Devant elle se trouvait un pupitre qui fit très vite connaissance avec Ivan.

- C’est ça un supercalculateur ? Demanda Elsa. Ce n’est pas très sexy…

Thierry sourit et tapa une ligne de commande. Tout un mur d’écrans se réveilla pour diffuser d’incompréhensibles suites de graphiques et de courbes erratiques ornées de valeurs chiffrées en constante variation.

Ivan parcouru divers fichiers et lança plusieurs applications en s’efforçant d’expliquer ce qu’il découvrait.
L’inspecteur n’essaya pas de comprendre, il s’était mis discrètement en retrait et observait son environnement. C’était un « monde d’informaticien » comme il en avait connu lors de son stage à la police scientifique, il n’y manquait que les traces de coca et de pizza. Paul n’avait retenu qu’une chose de ces spécialistes : Ils étaient prêt à dépenser une fortune pour jouer sur un ordinateur mais considéraient comme une hérésie de l’utiliser pour rédiger des rapports d’activité ou éditer des factures. Or, c’était exactement ce que l’inspecteur recherchait.
Paul sorti de la salle du calculateur et chercha le bureau équipé de l’unité centrale la plus basique et de l’imprimante la plus sophistiquée. Il alluma l’ordinateur puis réprima un juron.

- Ils laissent leurs portes ouvertes mais protègent leurs ordinateurs !!
L’administrateur local devait être un tyran de la sécurité mais Paul pensa que cela pourrait lui servir.
- Il leur a certainement imposé un mot de passe « durci ».

Il essaya de se rappeler les contraintes minimales : au moins huit caractères composés de majuscules, minuscules, caractères spéciaux et chiffres. Efficace du point de vue technique, cette méthode recelait une faille sous son aspect humain : peu de mots faciles à retenir respectaient ces règles.
Paul chercha un mot de huit lettres apprécié par les Templiers et l’écrivit en débutant par une majuscule. Il chercha ensuite quel caractère spécial et quel chiffre pouvaient ressembler à une des lettres du mot. Alors il saisit sur le clavier :

« B@ph0met »

Bien que fier de son raisonnement il resta stupéfait lorsque la session s’ouvrit. L’inspecteur déballa le disque dur prêté par ses collègues de la « scientifique » et lança un logiciel qui y transféra l’intégralité de la mémoire de l’ordinateur.
Après cela il ne lui restait qu’un problème à régler : arracher Ivan à son siège.

De retour au manoir l’inspecteur félicita ses collaborateurs. L’étude des documents trouvés était maintenant une mission classique de police et de justice et il était très optimiste sur la possibilité d’obtenir les renseignements permettant de clôturer son enquête. Il autorisa cependant ses invités à garder leur chambre une nuit ou deux pour récupérer.

Estimant qu’il était temps de retrouver sa petite maison, Elsa mettait un peu d’ordre dans ses affaires lorsque quelqu’un frappa à la porte. Elle eut la surprise de voir Thierry portant deux coupes de champagne.

- Ivan est en train d’éplucher des pages de listings, j’ai donc décidé de venir te tenir compagnie avant le dîner.
Charmée par l’attention, la jeune fille lui offrit un fauteuil.
- C’est une gentille idée, et qui s’accorde très bien avec ce lieu magnifique.
- Oui, nous avons de la chance.
Il fronça les sourcils comme s’il avait quelque chose d’important à dire.

- J’ai parlé un peu avec le comptable de l’hôtel, nous avons évoqué le prix des chambres.
…Ce n’est pas donné.
Elsa se refroidit un peu.
- Ce que tu appelles « le » comptable, ça ne serait-pas la blondasse qui sort de son bureau dès que tu passes dans le couloir ?
- Elle se prénomme Isabelle. Tu ne trouves pas surprenant que la police française puisse nous financer une telle prestation ?
- Le jeu en vaut peut-être la chandelle.
- Bien sûr, répondit-il avec une grimace ironique. J’imagine notre inspecteur demandant que l’on retire un budget à la lutte contre le crime pour l’affecter à une enquête sur les Templiers. A propos de forces de l’ordre, quelle était la couleur de la voiture qui t’a arrêtée à la sortie du cocktail ?
- Quelle question ? Blanche comme toutes les voitures de police.
- Cela pose pourtant un problème, l’endroit où nous avons eu notre contrôle d’alcoolémie est en zone gendarmerie.
- Peut-être. Et alors, qu’en déduis-tu ?
- Rien, mais je crois que je ne vais pas accorder une confiance aveugle à notre généreux inspecteur.
- Moi je crois que tu fréquentes trop de gens qui ne songent qu’à leur intérêt.

Le visage de Thierry montra qu’il avait reçu durement la pique, il posa son verre sur la table et se leva.
- Désolé que tu m’imagine ainsi. Je vais voir si Ivan a avancé. A bientôt pour le dîner.

Comme après chaque conversation avec Thierry, Elsa était énervée, mais cette fois sa colère s’adressait à sa propre personne. Sa réflexion était stupide et injuste. Elle se dirigea vers la fenêtre espérant le voir sortir du bâtiment mais c’est la silhouette de l’inspecteur qu’elle aperçut. L’homme franchit le portail de la propriété et entama une conversation téléphonique sur le bord de la route.

- Pourquoi s’isole-t-il ? Se demanda-t-elle.

Se souvenant des doutes de Thierry, la jeune fille pris ses affaires et sorti pour tenter une approche discrète. Un véhicule de police déboucha alors de la gauche et reparti après avoir pris l’inspecteur à son bord. Poussée par la curiosité, Elsa sauta sur son solex pour tenter une filature.
Le véhicule prit rapidement de l’avance mais, alors qu’Elsa désespérait, ses feux arrière augmentèrent en luminosité lorsqu’il aborda le premier sous-bois. En dépassant l’endroit elle vit la voiture de police la distancer mais aperçu un autre véhicule garé sur le côté gauche près d’un petit cimetière.

- Est-ce pour elle que la voiture de police a freiné ?

Arrivant à sa hauteur, Elsa constata qu’elle était vide. Elle portait une plaque diplomatique et un attaché case était resté sur le siège passager. Recouvert d’un cuir raffiné, ses serrures étaient ornées de deux signes asiatiques.

- Les symboles de la chevalière du « touriste » japonais !

Image

L’historienne dissimula son vélomoteur derrière une barrière amovible, prit une photo de la mallette puis elle s’approcha discrètement du cimetière. Celui-ci était minuscule et désert mais au cœur du bois attenant une légère lueur perçait. Elle provenait d’une sorte de petite chapelle. Elsa se dissimula dans un enclos surmontant un caveau souterrain et installa son appareil photo d’ornithologue. Malgré l’obscurité, le puissant objectif lui permis de constater que les vitraux étaient trop opaques pour justifier une approche.

C’est alors qu’une augmentation de la lumière ambiante lui fit deviner qu’on ouvrait la porte. Elsa régla rapidement son appareil sur un temps d’exposition adapté et attendit. Deux silhouettes se détachèrent bientôt dans le halo. Elsa, tentant de préserver l’immobilité de l’appareil et appuya sur le déclencheur.
- Ho nooon !

Elle avait oublié de désactiver le flash automatique. Un des hommes martela deux ordres incompréhensibles. Abandonnant son appareil, Elsa couru vers son véhicule mais deux jeunes asiatiques apparurent comme par enchantement du côté de l’étang.
La jeune fille enjamba rapidement son solex et leur échappa de justesse. La course lui sembla gagnée jusqu’à ce qu’un des poursuivants saute pour agripper une sacoche mais celle-ci lui resta dans les mains quand Elsa pédala pour aider le moteur.
Les deux hommes firent volte-face et coururent vers leur voiture en proférant d’intraduisibles jurons.

Elsa fonça droit sur la Seine mais, atteignant la rive, tourna à gauche et chercha un endroit à couvert où elle coupa son moteur. Comme elle l’avait craint le véhicule s'arrêta devant la mairie et les occupants coururent vers sa petite ferme. A la simple force du pédalier, Elsa prit silencieusement le sentier de rivage dans la direction opposée.

Elle avait parcouru une certaine distance lorsqu'elle entendit courir derrière elle.
Trop lourd pour une bicyclette son engin perdit vite du terrain, Elsa tenta plusieurs fois de relancer le moteur mais la manœuvre et les chaos provoquèrent sa chute. Une jambe coincée sous le véhicule, elle vit avec horreur ses poursuivants approcher inexorablement.
Elsa tira une nouvelle fois sur la corde du démarreur et entendit une rassurante pétarade. Se dégageant rapidement elle enfourcha le vélomoteur qui accéléra à moins d’un mètre des asiatiques. La course folle fut un moment incertaine puis les hommes se résignèrent à poursuivre la chasse en véhicule.

Par chance, celui-ci ne pouvait pas s’engager sur la berge mais Elsa devrait bientôt la quitter pour prendre l’unique pont d’un affluent.
Débouchant sur la route elle fut satisfaite de ne voir aucune lueur de phare. Tremblante de frayeur elle franchit le pont à vitesse maximale, mais soudain deux feux s’allumèrent devant elle et une silhouette menaçante lui fit signe d’arrêter.
Ne trouvant pas d’échappatoire, Elsa ralentit en relevant le galet moteur tout en gardant l’accélérateur à fond de course.
Alors que l’homme s’approchait d’elle, Elsa poussa le galet contre la roue et, l’appuyant de toutes ses forces, fonça entre l’ombre et le véhicule. Avant que celui-ci ne fasse demi-tour, le vélomoteur avait atteint le GR de rivage inaccessible à la berline.
Plus en aval, seul un camping offrait des voies carrossables, Elsa y pénétra la première mais fut vite rejointe. La voiture tenta plusieurs fois de lui couper la route mais le large espace vidé par l’hiver facilitait les manœuvres évasives du deux-roues. Quand les asiatiques décidèrent de débarquer pour la cerner, Elsa fonça droit sur la suite du sentier de rivage, les semant à nouveau.

La voie sur berge du prochain village était le siège d’une promenade dominicale presque rituelle. La foule vaquait, contemplant, la Seine sous la chaleur confortable de ses manteaux de saison.
Soudain, l’affolement progressa telle l’onde d’une vague lorsqu’une furie chevauchant un monstre pétaradant déboucha au milieu des badauds. Elsa savait qu’il s’agissait du dernier passage délicat et fonçait droit, ne comptant que sur le cri grinçant de sa sonnette pour écarter les quidams.
Derrière elle, après la surprise, des attroupements vociférant s’amalgamèrent. C’est au cœur de ce dispositif qu’émergea la voiture des poursuivants. Ils furent vite bloqués par la réprobation des villageois et les aboiements de leurs compagnons. La voiture s’engagea dans une ruelle perpendiculaire pour sortir du piège.
Elsa souffla, ralentissant sa course pour diminuer les risques. Le bruit faiblissant lui permit d’entendre quelqu’un courir derrière elle. Sans vérifier de qui il s’agissait elle reprit son rythme sauvage et sortit de la zone piétonnière avec une avance qui ne pouvait que s’amplifier mais elle ne fut pas surprise de voir la berline déboucher d’une rue latérale. Heureusement celle-ci s’arrêta pour embarquer le poursuivant épuisé.
Elsa sut alors qu’il lui restait une chance. Une chance qui était le premier but de son échappée.

Bientôt un bruit commença à se distinguer du vacarme du petit moteur, il révélait la proximité d’une des grandes écluses de la Seine.
Couchant son véhicule dans un virage à peine contrôlé Elsa s’engagea sur l’étroite passerelle du barrage dont elle grimpa la pente dans un pédalage forcené.
La voiture stoppa à son pied dans un crissement de pneus fumants. Le conducteur couru à la poursuite de la jeune fille mais celle-ci avait virtuellement gagné. Le prochain pont routier était loin et, après la passerelle, le coureur n’aurait plus aucune chance.
Familière des lieux, Elsa fixa la rampe de sortie perpendiculaire, dernier passage difficile pour descendre sur l’autre rive. Elle vit avec stupeur, une voiture s’y arrêter et un homme en sortir pour s’élancer à l’assaut de la passerelle.
La jeune fille freina brusquement et laissa tomber son vélomoteur. Dos à la rambarde elle observa alternativement ses deux adversaires ne sachant que faire. Elle songeait à sauter sur la péniche qui amorçait la sortie de l’écluse lorsqu’à sa stupéfaction l’asiatique hésita, ralenti puis rebroussa chemin à reculons.
Elsa hurla quand elle senti une main se poser sur son épaule.

- Police nationale. L’inspecteur Reval souhaiterait vous voir mademoiselle.
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Message par colombane »

Haletant cette poursuite !
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Message par bob d artois »

:flowers:

On ne l'attrape pas comme ça la petite Elsa

Bon, ça ne doit pas être facile à suivre pour quelqu'un qui ne connaît pas le fonctionnement d'un Solex :lol:

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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par ducale78 »

bob d artois a écrit ::flowers:

On ne l'attrape pas comme ça la petite Elsa

Bon, ça ne doit pas être facile à suivre pour quelqu'un qui ne connaît pas le fonctionnement d'un Solex :lol:

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C'est vrai c'est ancien mais c'est robuste !! Il n'y a qu'à voir comment elle s'en sert avec virtuosité :lol: :lol:
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Message par bob d artois »

C'est aussi un des rares véhicules motorisés à pouvoir rouler dans 50cm d'eau :one:
Mais j'ai supprimé la partie qui y faisait référence pour ne pas alourdir l'histoire.
Et pour ne pas ajouter un spot où il faut se mouiller les genoux :lol:
Un peu en retard pour la suite, je m'y colle B)

Bob
Dernière modification par bob d artois le lun. 29 févr. 2016 00:27, modifié 2 fois.
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Message par bob d artois »

II- La Tour de Nesle.

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La fourgonnette du policier déposa Elsa et son véhicule à l’entrée du manoir et reparti immédiatement. Les genoux encore tremblants, la jeune fille traversait le parc quand elle aperçut Thierry fumant une cigarette avec une des femmes de chambre. Elle sauta dans ses bras tentant de conter nerveusement son aventure.

Thierry l’arrêta d’un geste tendre, souleva une mèche de cheveux mouillés pour voir ses yeux.
- C’est fini, tu es en sécurité ici. Tu dois d’abord te reposer.

Il se tourna alors vers la femme de chambre.
- Céline, je dois m’absenter, peux-tu prendre soin d’elle avant mon retour ?

La jeune employée prit délicatement le bras d’Elsa.
- Bien sûr. Suivez-moi je vais vous préparer un bon bain et avertir vos amis.

Regardant partir Thierry avec stupéfaction Elsa demanda presque machinalement.
- L’inspecteur voulait me voir…
- Il n’est pas encore arrivé. Venez, il attendra bien que vous soyez remise.

Anne-Sophie arriva très vite dans la chambre et prit soin de son amie. Elle attendit qu’elle ait finit de se sécher les cheveux pour lui faire conter son aventure.

- Mon Dieu ! Tu as été très courageuse.
- Ne crois pas ça, j’ai eu très peur, mais le pire m’attendait ici.
- Que veux-tu dire ?
- J’ai rencontré Thierry en arrivant. Il était encore en train de draguer. J’ai voulu lui confier mon histoire mais il m’a interrompue pour filer on ne sait où.

Anne-Sophie était devenue blême.

- Et tu l’as laissée partir !
Mon Dieu…

Elle se tourna vers la femme de chambre.
- Pouvez-vous rester ici ? Il faut que je parte immédiatement.

Elle disparut sur ces mots sans prendre le temps d’attendre la réponse. Stupéfaite, Elsa cria vers la porte qui se refermait.

- Tu ne vas pas aussi m’abandonner !

Céline pris un regard sévère qui tranchait avec son attitude professionnelle et respectueuse.
- Vous n’avez donc rien vu dans les yeux de Thierry ? Vous ne comprenez pas qu’il est allé à la recherche de vos agresseurs ?

Ayant enfin compris, Elsa se précipita à l’extérieur et arriva juste à temps pour arrêter la voiture dans laquelle Ivan et Anne-Sophie avaient pris place.
Au même moment, le véhicule de Thierry se présenta à l’entrée, tous furent surpris par la présence de l’inspecteur sur le siège passager.

Thierry avait retrouvé les deux jeunes asiatiques près de la chapelle. Ceux-ci avaient fouillé les abords du cimetière et retrouvé l’appareil photo d’Elsa. Avant que la lutte s’engage, la police était intervenue, avait saisi l’appareil et inculpé les deux hommes pour vol, en attendant mieux.

Le repas fut l’occasion pour Elsa de conter plus sereinement son aventure. Elle finissait son récit lorsqu’un policier pénétra dans la pièce. Il murmura quelques mots à l’inspecteur et lui donna une boîte en carton avant de partir sans un mot.
L’inspecteur confia le colis à Elsa d’un air désolé.

- Nous avons dû libérer nos suspects faute de charges. Votre appareil n’est pas trop endommagé, mais ils ont eu le temps d’effacer vos clichés. Nous avons conservé la carte mémoire au labo pour essayer de récupérer quelques fichiers.

Elsa déballa fébrilement le colis et inspecta son appareil. A la surprise de tous son visage se fendit d’un sourire.

- Lorsque j’ai modifié les réglages de mon appareil pour prendre les photos de nuit, je lui ai également indiqué d’utiliser la carte mémoire amovible mais les clichés précédents ont été stockés dans sa mémoire interne. Ils ne l’ont pas effacée.

La grimace de l’inspecteur indiquait son opinion sur le travail de ses subordonnés.

- Combien de photos ?
- Une seule concernant notre affaire. Répondit-elle en lui passant l’appareil.

Il s’agissait de la photo de l’attaché-case laissé dans la voiture. On voyait distinctement les symboles asiatiques qui y figuraient. L’inspecteur reposa l’appareil d’un air détaché.

- Vous auriez mieux fait de prendre la plaque d’immatriculation. A propos, vous ne nous avez pas dit une chose mademoiselle : pourquoi vous être rendue de nuit dans ce cimetière ?

Elsa ne pouvait pas répondre qu’elle avait pris l’inspecteur en filature. Sa photo lui vint en aide.

- J’ai été intriguée par le fait qu’une voiture stationne devant un cimetière à cette heure puis j’ai reconnu les deux symboles. J’en avais vu d’identiques sur la chevalière du japonais que nous avons rencontré à Château Gaillard. Je pense que cet homme s’intéresse aussi de très près aux Templiers. Peut-être en est-il un lui-même.

Thierry reposa l’appareil photo dont il observait l’écran depuis un moment.

- Ce n’est pas un Templier japonais, c’est un chinois qui s’intéresse aux Templiers.

Comme tous, l’inspecteur fut surpris par cette intervention.

- Vous avez l’air d’en savoir plus que nous, d’où tenez-vous cela ?
- Disons que dans mon métier il peut être utile de savoir lire le mandarin. Je dirais surtout que cela confirme un soupçon qui m’est venu il y a quelques jours. Comment s’appelait la tour où Marguerite passait de bons moments dans son lit et des amants par la fenêtre ?
- La tour de Nesle.
- Ce nom ne vous fait-il pas penser à l’une des plus grandes entreprises helvétique ?
- Vous pensez au fabricant de produits laitiers ?
- Exactement. Vous nous avez dit que pour revenir en France en tant que financiers, les Templiers s’étaient appuyées en sous-main sur de grandes entreprises locales or, celle-ci s’est associée à la Banque Suisse et Française en 1905.
- C’est un peu léger comme suspicion, et vous oubliez le « t » muet dans le nom de la société, à moins que vous suggériez que ce soit le « T » de « Templier » ?
- Non, le nom de la société vient du nom de son fondateur prénommé Henri, c’est dans un deuxième temps que le lien a été fait. Vous noterez par exemple que lorsque la société s’est orientée vers le café soluble ou les capsules jetables hors de prix, ce « t » a disparu, comme pour beaucoup de produits de la marque. La société d’Henri était prometteuse mais son rayonnement n’a explosé que lorsqu’elle a reçu une médaille d’or à l’exposition universelle de Paris, en 1872. C’est là que les réseaux d’influence des Templiers jouèrent. Trois ans plus tard l’entreprise devenait une société anonyme indépendante de son créateur. De son côté, la Banque Suisse et Française fut plus tard englobée dans un conglomérat financier comprenant notamment la Banque Dupuy de Parseval.
- Je vois, encore une fois le nom leur plaisait, Perceval est le découvreur du Graal.
Admettons, mais quel rapport avec nos chinois ?
- D’abord le signe que portait l’homme signifie chevalier en chinois. Mais le second symbole diffère légèrement par rapport à l’idiome usuel.

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- Ah oui, on dirait la croix templière.
- Une des croix. C’est ici que ça devient intéressant. Le chiffre templier s’appuie sur sept croix extrapolées de la croix des huit béatitudes. Une seule permet avec ses lettres la composition d’un mot.
- Ah oui, amusant… Cela veut dire lait en anglais ?
- Tout juste. Savez-vous où est à ce jour le plus puissant supercalculateur du Monde ?
- En Chine je parie.
- Exactement et son nom est Tianhe-1 ce qui signifie « Voie lactée », « Milky Way » en anglais.
- Milky Way ? on dirait le nom d’une barre de chocolat s’interrogea l’architecte.
- Oui, celle d’un conçurent, eux, ne chassent que le lion, comme les Templiers. Répondit le trader avec humour.

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rappel top 500 supercalculateurs à l'époque de l'histoire

A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?

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bob d artois
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

Pour un des deux derniers spots on s'ait arraché le cheveux avec Tioo pour cacher. Mais elle m'a fait un beau bricolage :flowers: j'éspère que ça tiendra B)
A quoi ça sert de tuer l'ours, si on n'a pas d'abord vendu la peau ?

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platdetain
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par platdetain »

bob d artois a écrit :C'est aussi un des rares véhicules motorisés à pouvoir rouler dans 50cm d'eau :one:
Mais j'ai supprimé la partie qui y faisait référence pour ne pas alourdir l'histoire.
Et pour ne pas ajouter un spot où il faut se mouiller les genoux :lol:
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Surtout qu'à cette profondeur-là, il aurait fallu préwar le tuba pour la wa !! :jesors:
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bob d artois
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

Ça devrait lui rappeler une grande performance de Takiko en Brière.

Super spot mais on ne savait pas trop dans quoi on marchait :rolleyes:

Bob
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

III- Eliphas Levi

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L’hypothèse de Thierry avait intrigué l’inspecteur. Après avoir demandé à Elsa une copie de sa photo, il avait quitté le manoir en leur fixant rendez-vous pour le lundi soir. Il voulait mettre à profit cette journée pour enquêter plus avant sur l’entreprise helvétique et exploiter les interrogatoires des deux suspects.

Lundi 3 janvier 2011

Au petit déjeuner Anne-Sophie remarqua une nouvelle fois qu'Ivan semblait préoccupé.

- Ce sont ces Chinois qui t’inquiètent ?
- Pas vraiment, si les Templiers cherchent bien ce que nous croyons, il est normal qu’ils attirent la curiosité de puissances internationales. Mais que pensez-vous de notre inspecteur ? Comment a-t-il pu réagir si vite pour aider Elsa et arrêter ses poursuivants ?
- Peut-être exagère-t-on l’impuissance de notre police ?

Thierry saisit l’occasion pour émettre les doutes dont il s’était ouvert à Elsa.

- Ça devient troublant en effet, que crois-tu que cela dissimule ? Demanda l'architecte.
- Il est évident qu’il nous cache quelque-chose. Personnellement, je suis persuadé qu’il s’agit du trésor des Templiers.
- Allons bon. Nous y revoilà.
- Nous avons trouvé trois coffres vides, leur contenu est certainement quelque part. Mon idée est qu’il s’agît bien du trésor qui a quitté le Temple lors de l’arrestation de 1307. Ce que je ne comprends pas c’est pourquoi ils n’ont pas pris une route plus directe vers l’Angleterre et pourquoi ils se sont arrêtés à Gisors.
- La route directe suivait la Seine, dit Elsa, c’est un trajet qui devait être très surveillé.
- Et qui passait par les Andelys, remarqua Anne-Sophie. Puisqu’on en parle, j’aimerais vous montrer quelque-chose qui m’a intriguée.

Elle recouvra alors les bols et les croissants avec la carte qui semblait ne jamais la quitter.

- Rappelez-vous Gisors. J'avais fait le lien entre une croix percée et une roche trouée. Et bien il existe aussi un endroit nommé « roche percée » et c’est tout près d’ici.
Elle montra un endroit sur la carte mais Thierry ne jugea pas nécessaire de s’approcher pour confirmer l’information. Il s’essuya la bouche attrapa sa veste et :

- Qui conduit ?

L’endroit, bien indiqué sur les cartes, était plus ardu à trouver sur le terrain. Ils descendirent la falaise puis, à mi-hauteur, Anne-Sophie s’engagea à gauche sur un petit sentier que les autres n’avaient pas vu. Avant qu’ils ne montent la rejoindre elle poussa un cri et couru à leur rencontre.

Sans attendre d’explications, Ivan s’enfonça dans le sentier. Après s’être arrêté pour observer ce qu’un angle de falaise occultait il se retourna avec des yeux horrifiés.

- Baphomet !!

Puis il pouffa de rire alors qu’un petit bouc le dépassait pour aller à la rencontre des autres visiteurs.

- Comment ça « Baphomet » ? Demanda Anne-Sophie en se protégeant derrière Thierry. Vous n’avez pas peur qu’il nous charge ?

Elsa s’était agenouillée pour caresser l’animal.

- La représentation la plus courue de Baphomet est « la chèvre sabbatique » qui serait plutôt un bouc. Mais elle ne fut imaginée qu’en 1954 par Eliphas Levi, un occultiste qui illustra également « le comte de Monté Cristo » de Dumas. C’est vous dire la crédibilité historique de cette hypothèse.
Regardez ! Il semble nous inviter à le suivre.

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- Il est hors de question que je m’approche de lui ! Sans parler de l’odeur qu’il dégage, dit Anne-Sophie en agrippant Ivan pendant que Thierry et Elsa s’engageaient sur la falaise à la suite de l’animal.

Celui-ci s’arrêta plus loin à l’entrée d’une grotte. Sans hésiter, les jeunes gens s’engouffrèrent dans la galerie à la lueur de leurs téléphones portables mais Ils furent bientôt obligés de ramper pour passer un boyau particulièrement étroit.
Celui-ci déboucha sur une cavité où ils purent se redresser et constater qu’un autre boyau conduisait plus loin. C’est alors dans un dédale de galeries qu’ils s’aventurèrent pénétrant profondément dans la colline.

Lorsqu’ils ressortirent, épuisés et maculés de craie, ils trouvèrent Ivan en compagnie de « Baphomet ».

- Je commençais à m’inquiéter, vous avez trouvé quelque-chose ?
- Non, juste une grotte sans rien à l’intérieur.
- Cela ne me surprend pas, je pense que l’endroit que nous cherchons se trouve plus bas, à l’aplomb d’ici. Anne-Sophie y a trouvé quelque-chose d’intéressant.

Les jeunes gens descendirent une longue pente puis longèrent à nouveau la falaise. Anne-Sophie les attendait dans une cavité qui n’avait rien d’une grotte. Elsa était déçue.

- Il n’y a rien ici Anne-Sophie !
- Il n’y a plus rien. Rétorqua l’architecte. Regarde mieux la falaise que tu viens de suivre. Tu constateras qu’elle est percée à intervalles réguliers de trous permettant d’encastrer des poutres.
- Comme ceux des hourds de Château Gaillard ?
- Oui en plus petits. Cet endroit était un abri, et un abri fait pour durer. Regarde bien, cette roche a été taillée de main d’homme. Reste à savoir pourquoi faire.
- Ça, c’est le plus simple, dit Elsa en lui passant sa lunette d’observation. Cet endroit offre une vue parfaite sur Château Gaillard.
- C’est vrai dit Anne-Sophie en réglant l’appareil pour améliorer la netteté de l’image. On pourrait presque voir l’intérieur de la chambre de Marguerite.
- Sauf que les Templiers n’étaient pas équipés de télescopes.
- Qui sait ? Répliqua l’architecte. Héron d’Alexandrie est célèbre pour l’invention d’un dioptre. Plus sérieusement je pense que l’abri date d’avant l’emprisonnement de Marguerite.
- Je vois à quoi tu penses, dit Thierry. Avant Margueritte le château fut aussi la prison de Jacques de Mollay.
- Et bien avant encore les Templiers avaient songé à l’acheter à Philippe le Bel, mais je ne crois pas que c’était pour en faire une prison. Répondit Elsa. Tu te souviens du fameux camp romain de Jublain dont je vous ai parlé ?

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- Oui un vestige qui serait trop petit pour une caserne et trop grand pour une villa.
- Oui, je me suis trompé en déclarant qu’on supposait qu’il s’agissait d’une prison, en réalité les historiens pensent plus à un entrepôt ou…
- Une banque ?
- Disons plutôt un coffre-fort et c’est peut-être le cas de la partie basse du faux donjon des Andelys.
- C’est assez inhabituel pour un château non ?
- Oui mais la situation l’était également. On admire Guillaume le conquérant pour son invasion de l’Angleterre, on oublie que cette victoire le plongea ainsi que ses successeurs dans un abîme de difficultés. Gérer un royaume séparé par la Manche n’était pas une mince affaire, surtout en période de guerre. Les nerfs de la guerre sont les pécunes, celles de France venaient du trésor royal bien au chaud dans sa capitale. Les anglais étaient obligés de détacher une partie du leur en Normandie pour payer leurs troupes.
- Dans ce cas, pourquoi le placer dans cette forteresse qui était en première ligne ?
- Lorsque le roi d’Angleterre combattait en France, il devait garder des troupes à Londres pour maintenir la fidélité de l’île. Impossible pour lui de détacher encore des hommes pour protéger une base arrière à Calais ou Rouen. Il devait garder son or dans sa forteresse la plus puissante, près de lui et de son armée, c’est-à-dire sur la ligne de front.
- Je comprends, mais quid des Templiers ?
- Je vous ai parlé des émeutes de 1306 qui ont obligé le Roi à se réfugier dans le Temple. Je pense qu’eux-mêmes ont songé à trouver un endroit sûr, loin des parisiens pour cacher leurs valeurs. Quoi de mieux que de s’offrir une forteresse conçue pour cet usage et désormais sans emploi ? Une banque se protège de l’intérieur mais se surveille de l’extérieur, d’où cet abri. Malheureusement pour eux les événements bouleversèrent leurs projets et les Templiers ayant échappé à la rafle créèrent dans la précipitation un dispositif similaire : la tour de Neaufles pour cacher les coffres et une grotte pour surveiller ladite tour.
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Re: Le Templier et le Papillon : nouveau Polar Cistique du B

Message par bob d artois »

Il est mignon Baphomet non ? :cat:

J'éspère que vous le rencontrerez pour ceux qui iront chercher les cistes.

En tout cas il était là à chacune de mes visites, parfois au début, parfois à la fin.

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